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Cloches – Saint Maurice (CH-VS) abbaye territoriale de Saint-Maurice d’Agaune

Nouveau battant, nouvelle présentation !

-Cloche 1, « Trinitas », note sol#2, poids 4’100kg, refondu en 2010 par Paccard à Sévrier
-Cloche 2, « Thébaine », note do#3, diamètre 145cm, poids 1732 kg, coulée en 1947 par Ruetschi d’Aarau
-Cloche 3, « Saint Maurice », note mi3, diamètre 115cm, poids 920kg, coulée en 1818 par Pierre Dreffet et Marc Treboux de Vevey
-Cloche 4, « Saint Sigismond », note fa#3, diamètre 103cm, poids 620kg, coulée en 1818 par Pierre Dreffet et Marc Treboux de Vevey
-Cloche 5, « Saint Augustin », note sol#3, diamètre 92cm, poids 450kg, coulée en 1818 par Pierre Dreffet et Marc Treboux de Vevey
-Cloche 6, « Saint Théodule », note la3, diamètre 86cm, poids 350kg, coulée en 1818 par Pierre Dreffet et Marc Treboux de Vevey
-Cloche 7, « Marie-Madeleine », note si3, diamètre 77cm, poids 260kg, coulée en 1818 par Pierre Dreffet et Marc Treboux de Vevey
-Cloche 8, « Candide », note do#4, diamètre 69cm, poids 180kg, coulée en 1818 par Pierre Dreffet et Marc Treboux de Vevey

L’abbaye territoriale de Saint Maurice d’Agaune a été fondée en 515 par le futur roi burgonde Saint Sigismond, à l’emplacement d’un sanctuaire plus ancien érigé par Théodore d’Octodure, premier évêque connu du Valais, et abritant les reliques de Maurice d’Agaune, martyr du IIIe siècle. La cité d’Agaune a d’ailleurs pris son nom et s’appelle aujourd’hui Saint Maurice. L’abbaye est la plus ancienne d’Europe occidentale en activité à avoir été occupée en permanence. Si le premier sanctuaire, dont les fondations ont été mises en valeur, fut érigé dans le sens classique est-ouest, les nombreux éboulements successifs poussèrent finalement les chanoines à le reconstruire au XVIIe siècle dans le sens nord-sud. Cela n’empêcha pas un nouvel éboulement de créer de gros dégâts en 1942, obligeant ainsi la flèche du clocher et une partie de l’église à être reconstruits. L’abbatiale occupe le rang de basilique mineure depuis 1948. L’abbaye ne fut jamais dépendante d’un diocèse et d’un évêque, car elle bénéficia dès sa fondation de l’immédiateté pontificale, c’est-à-dire qu’elle dépend directement du Pape et de lui seul. Aujourd’hui encore, le père abbé de Saint-Maurice exerce sa propre juridiction spirituelle sur sa communauté abbatiale, ainsi que sur les cinq paroisses de son territoire. L’abbaye possède également un collège renommé ayant un statut d’établissement semi-privé.

Les cloches à la volée – L’imposant clocher roman avec sa flèche de pierre, typique de la Vallée du Rhône, semble se dresser ici depuis la nuit des temps. Or, quand on y monte, on se rend compte que les étages supérieurs et sa flèche sont en béton habillé de pierres. Le terrible éboulement du 3 mars 1942 éventra la tour avant qu’une rafale de foehn ne la fasse s’écrouler complètement deux jours plus tard. Miracle : les cloches de 1818 s’en tirèrent avec quelques ébréchures. Elles sonnent toujours, vaillamment. Trois d’entre elles ont subi un petit accordage au XXe siècle. Cet ensemble de six cloches en mi3 est l’œuvre de fondeurs veveysans déjà maintes fois rencontrés en Suisse romande : Pierre Dreffet et son neveu Marc Treboux. Nous sommes ici en présence du plus grand ensemble toujours existant réalisé par la fonderie de Vevey. Ruetschi d’Aarau y ajouta en 1947 « Thébaine », une cloche donnant le do#3. Son arrivée coïncida avec la mise en service d’un carillon électrique offert par un ancien élève du collège de Saint-Maurice. « Thébaine » fut durant plus de cinquante ans le bourdon de l’abbaye. Pour le passage à l’an 2000 fut offerte une grande cloche coulée en 1998 par la fonderie Paccard dans un chantier naval de Nantes. Cette cloche était un modèle réduit à l’échelle 1/2 de la Cloche de la Paix de Newport, un monstre de 32 tonnes égrenant la note la1. Baptisée « Trinitas », cette « miniature », d’un poids de 3’990kg, fut bénie par Monseigneur Roduit le 29 novembre 1999. Les huit cloches sonnèrent toutes ensemble pour la première fois le 25 décembre. Installée dans un beffroi dressé sur une lourde dalle de béton, « Trinitas » fut équipé d’une motorisation débrayable et d’un pédalier permettant de la sonner en piqué. Ce mode de volée ne semble toutefois pas avoir été utilisé très souvent. « Trinitas », dépeint comme magnifique par le campanologue Matthias Walter, fêla malheureusement très vite. La fonderie Paccard accepta de refaire gratuitement une nouvelle cloche donnant la même note (sol#2). Le nouveau « Trinitas » vit le jour le 18 mars 2010 dans les ateliers de Sévrier devant une importante délégation de l’abbaye. Il fut hissé au clocher le 15 juillet. Son battant fut changé à l’été 2017 par la maison Ruetschi d’Aarau (voir galerie ci-dessous).

La sonnerie avant 1818 – L’histoire des cloches qui ont précédé la sonnerie actuelle, c’est d’abord cette pittoresque légende qui rapporte que Charlemagne aurait fait un songe. L’Empereur se serait mis à chanter et les cloches de Saint-Maurice auraient donné de la voix avec enthousiasme pour l’accompagner. Tout ceci ne nous indique évidemment pas ce que contenait le clocher à son édification au XIe siècle ! On sait seulement que secousses sismiques et éboulements se sont souvent succédé pour mettre à mal l’abbaye et ses cloches au fil des ans. Il est en outre rapporté que l’incendie du 23 février 1693 causa la perte de sept cloches. Il fallut attendre 1702 pour assister à la fonte de quatre nouvelles cloches. Curieusement, toutes ne furent pas confiées au même fondeur. La plus grande fut réalisée par Jean-Claude Livremont de Pontarlier. On pouvait y lire (en latin) : Béni soit le Nom du Seigneur. Le feu dévastateur m’a fait périr en 1693, mais l’unanimité du Chapitre m’a fait renaître en 1702. Mon parrain est Pierre de Riedmatten, bailli de la Patrie éminent en noblesse ; si l’on demande le nom de ma marraine, c’est Noble Elisabeth Ambiel. Que vive et fleurisse la liberté des Valaisans. Les trois autres cloches furent coulées par les saintiers lorrains Etienne et Nicolas Besson. Mgr Georges Schiner, qui dirigea l’Abbaye de 1764 à 1794, fit refondre la grande cloche à une date indéterminée. En 1818, l’Abbé Etienne-Germain Pierraz fit briser toutes ces cloches. Il confia à Pierre Dreffet et Marc Treboux de Vevey la réalisation d’une nouvelle sonnerie. Ces six cloches aux accents baroques nous sont par bonheur toutes parvenues.

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Antoine Cordoba est carillonneur à l’abbaye de Saint-Maurice (photo Max Hasler)

Le carillon – Après l’ajout du premier « Trinitas » pour le passage à l’an 2000, l’abbaye, dont la réputation musicale n’est plus à faire, se lance dans un projet d’envergure : un carillon. L’idée vient d’un ancien élève du collège qui manifestait un attachement au patrimoine campanaire abbatial. Le chanoine Roten, alors maître de chœur, organiste et carillonneur de l’Abbaye entame ce projet qu’il allait superviser pendant presque trois ans. Le projet initial était plutôt modeste. Il prévoyait la construction d’un instrument de trois octaves (environ 37 cloches), utilisant toutes les cloches de 1818. Forte de son succès, la souscription fut plus prolifique qu’imaginée par la communauté. Le carillon a alors pu être étendu à quatre octaves (environ 50 cloches). Il a même été décidé que certaines des cloches de volée (les 4 plus petites) ne soient pas employées. Leur sonorité ne répondait pas aux exigences musicales d’un véritable instrument de musique. Elles ont cependant été conservées et continuent de sonner en volée. Après un appel d’offres lancé par l’Abbaye, c’est la fonderie hollandaise Royal Eijsbouts qui fut retenue pour réaliser 45 nouvelles cloches, allant de 1404kg pour la plus lourde à 9,1kg pour la plus légère. Elles ont été fondues à la fin de l’année 2003. Arrivées au mois de juin 2004, elles ont été bénies par le Père-Abbé Mgr Joseph Roduit le 20 juin 2004 avant d’être hissées dans le clocher. Durant l’été, les ouvriers se sont activés pour installer le beffroi métallique qui allait les supporter, la cabine du carillonneur qui allait abriter le clavier et la transmission. Le clavier -parlons-en- est dimensionné pour entrer au centimètre près dans la travée de la cloche Thébaine. Pour le pédalier, on a préféré la norme américaine et un pédalier droit au lieu d’une forme concave et radiale, pour qu’il puisse tenir en totalité dans l’espace restreint imposé. De plus, ce dernier ne s’arrête qu’au « la » du 2eme octave au lieu du « do » suivant. Notons que deux pédales ont été ajoutées en grave : l’une est reliée au bourdon Trinitas, et l’autre est vacante, pour un bourdon intermédiaire qui verra peut-être le jour dans un futur plus ou moins lointain. Le carillon possède donc la tessiture suivante : Sol#2-Do#3 chromatique Do#7 sans Ré3 (do# au clavier). On peut noter qu’il est transpositeur : le do n’est pas un do réel mais un do#3. Le carillon s’est calqué sur les deux grandes cloches respectivement sol# et do#. Le carillon a été inauguré en grande pompe le 22 septembre 2004, à l’occasion de la Fête Patronale par le Chanoine François Roten, son titulaire, et Andreas Friedrich, carillonneur de Carouge et alors président de la Guilde des Carillonneurs et Campanologues Suisses. Le 26 septembre suivant, c’est le carillonneur d’Utrecht Arie Abbenes qui donne le concert inaugural retransmis pour l’occasion à la radio. Dès lors, le carillon est utilisé pour les fêtes religieuses (1eres et 2emes vêpres, et messe souvent pontificale) et pour quelques concerts plutôt occasionnels. En 2017, l’Abbaye innove en proposant un festival de carillon avec visites du clocher et plusieurs concerts. L’expérience devrait être reproduite dès 2019.

De gauche à droite, la cloche de sacristie, la cloche conventuelle et la cloche de la flèche

Les autres cloches – Pour compléter la description de l’impressionnant patrimoine campanaire de l’abbaye de Saint-Maurice, citons encore trois cloches de dimensions plus modestes. La première se trouve dans le clocheton qui trône au-dessus de chœur. Cette petite cloche nommée « Marie Elisabeth » a été fondue en 1988 par la fonderie Ruestchi. Elle remplace une ancienne cloche Livremont de 1752, hélas fêlée. Ses fragments sont encore conservés aujourd’hui. Les 42 kilos de « Marie Elisabeth » ont de la peine à rivaliser avec les presque 10 tonnes de la sonnerie à la volée du clocher! C’est pour cela qu’elle ne mêle pas sa voix avec ses grandes sœurs. Si aujourd’hui elle n’a aucune fonction attitrée, elle a servi de suppléante lors des travaux de 2012 durant lesquels toutes les cloches -ou presque- étaient dépourvues de leurs moteurs et battants. La deuxième cloche est plus près du plancher des vaches. Fondue en 1860 par Georges Paccard, cette cloche d’à peine 30 kilos a été redécouverte en 2015 entreposée dans le clocher. Nul ne sait la raison de sa fonte, son commanditaire ni son usage initial. Il a finalement été décidé de l’installer dans le chœur de la basilique, au-dessus de la porte de la sacristie. Depuis fin 2017, elle a la tâche de marquer le début des célébrations religieuses. La dernière cloche est la plus importante mais aussi la plus ancienne de l’abbaye encore en fonction : il s’agit de la cloche conventuelle. Disposée dans le corridor principal de l’Abbaye, à mi-distance entre les appartements du Père Abbé et du Révérend Prieur, cette cloche annonce chaque célébration et rassemblement propre aux chanoines, et ce depuis 1790. Cette cloche ne prend congé qu’entre la messe du Jeudi-Saint et le matin de Pâques, ou elle est remplacée par l’une des deux crécelles dont dispose l’Abbaye. Cette cloche estimée à 35 kilos porte la marque d’un fondeur Français « Goussel ». Cette dynastie aux origines lorraines n’a pas hésité à se déplacer dans différentes régions, jusque dans l’arc alpin.

Crédits
Textes : Claude-Michaël Mevs « Quasimodo » sauf « le carillon » et « les autres cloches » Antoine Cordoba
Photos : Antoine Cordoba (sauf mentionné)
Montage vidéo : Antoine Cordoba
Plans vidéo : Antoine Cordoba et Claude-Michaël Mevs
Prise de son : Antoine Cordoba

Remerciements chaleureux
Mgr Jean Scarcella, Abbé Territorial
Rd chne Roland Jacquenoud, Prieur Vicaire-Général
Chne Thomas Roëdder, Recteur & Sacriste

Sources :
« Les cloches de l’Abbaye », Léon Dupont-Lachenal, paru dans « Echos de Saint-Maurice », 1947, tome 45, p. 201-213
« Une nouvelle cloche à l’abbaye », article de François Roten, carillonneur, paru dans « Echos de Saint-Maurice », 2000, tome 95a, p. 30-34. © Abbaye de Saint-Maurice 2014
http://abbaye-stmaurice.ch/page.php?id=fr56
https://fr.wikipedia.org/wiki/Abbaye_territoriale_de_Saint-Maurice_d’Agaune

Cloches – Nyon (CH-VD) temple réformé

L’odyssée des cloches baladeuses

-Cloche 1, note do#3 +-0/100, diamètre 149cm, poids 1922kg, coulée en 1936 par Ruetschi d’Aarau
-Cloche 2, note mi3 +9/100, diamètre 124cm, poids 1’097kg, coulée en 1936 par Ruetschi d’Aarau
-Cloche 3, note fa#3 +8/100, diamètre 105cm, poids 780kg, coulée en 1518 par Guillaume Poctet et Nicolas Balley de Genève
-Cloche 4, note la3 +10/100, diamètre 93cm, poids 468kg, coulée en 1936 par Ruetschi d’Aarau
-Cloche 5, note si3 +87/100, diamètre 73cm, poids 310kg, coulée en 1446 par Jean Perrodet de Genève
-Cloche 6, note do#4 +47/100, diamètre 74cm, poids 243kg, coulée en 1936 par Ruetschi d’Aarau
[Cloche 7 (au tintement seulement), note ré#4 -19/100, diamètre 58cm, poids 100kg, coulée en 1617, signature « IG »]
la3 =435Hz, déviation en 1/100 de 1/2 ton

Ecoutez les solos des 7 cloches !

Jadis église Notre-Dame, le temple de Nyon est dédié au culte réformé depuis 1536. C’est le plus ancien sanctuaire chrétien de la ville. Il est inscrit comme bien culturel d’importance nationale. Un temple romain consacré au culte de Mithra a cédé sa place au VIIIe siècle à une première église, remplacée au XIIe siècle par l’édifice actuel. Au chœur roman est venu s’adjoindre la nef gothique au XIVe siècle. Le clocher médiéval dut être abattu en 1795 en raison de graves problèmes de statique. Dessinée dans le style néo-roman, la tour actuelle ne date que de 1936. Sa construction en béton armé n’a nécessité en tout et pour tout que trois mois ! De 2012 à 2016, le temple bénéficie d’une restauration complète. On assiste notamment à un relevage de l’orgue construit par Samson Scherrer en 1780. La travail a été confié au facteur d’orgues Pascal Quoirin à Saint-Didier près de Carpentras. La sonnerie s’est également enrichie de deux cloches… pas vraiment nouvelles !

Odyssée mouvementée que celle des cloches de Nyon ! Le clocher du temple, abattu en 1795, disposait de 4 cloches, dont une dans son lanternon. Pacotte, la plus grande cloche, d’un poids de 1’400kg, fut brisée sur place. La deuxième, donnée à 1’100kg, fut vendue à un Morgien du nom de Guibert. Une troisième cloche d’environ 800kg, coulée en 1518 pour l’église Saint-Jean détruite à la Réforme, se trouvait aussi au temple. Elle fut par bonheur conservée après 1795 pour être placée dans la Tour de l’Horloge toute proche où on lui adjoignit la compagnie d’une cloche neuve coulée en 1797 par Dreffet (ndlr : Pierre Dreffet à Vevey selon « Le Conteur Vaudois » ou Jean-Daniel Dreffet à Genève selon les inscriptions de l’actuelle cloche 4). Si la cloche de 1797 a été brisée en 1936, son aînée fut ramenée au temple après l’édification du nouveau clocher. En cette fameuse année 1936, pour commémorer dignement les 400 ans de la Réforme, il fut passé commande chez Ruetschi de quatre nouvelles cloches en do#3. On pensait alors qu’un bourdon en la2 serait ajouté ultérieurement quand les finances le permettraient. Une vaste travée lui resta d’ailleurs longtemps réservée. Mais en 2016, on choisit d’installer deux petites cloches historiques jusque là reléguées au Musée Historique de Nyon. Une cloche d’horloge, qui se trouvait vraisemblablement dans le lanternon de l’ancien clocher, a ainsi retrouvé sa première mission : elle tinte désormais les heures et les demies. Cette cloche, datée de 1617, a beaucoup voyagé : après destruction du vieux clocher, elle a été accrochée dans un clocheton dressé sur le toit du temple et démonté en 1936. La cloche s’est alors retrouvée un temps au-dessus du bâtiment des postes ! 2016 a vu aussi la remise en service d’une cloche de 1446, aujourd’hui équipée pour sonner à la volée après réparation de son cerveau.

Galerie archives : à gauche, le temple de Nyon avant 1936. A droite, le bâtiment de l’ancienne de poste de Nyon (toujours existant). On distingue la cloche de 1617 installée sur le faîte du toit.

Détails des cloches
Les cloches 1, 2, 4 et 6 portent toutes la signatures de Ruetschi d’Aarau et la date de 1936. Elles sont ornées des armoiries de la ville de Nyon et portent toutes la mention : QUATRIEME CENTENAIRE DE LA REFORMATION DANS LE PAYS DE VAUD. On y trouve en outre les inscriptions suivantes
Cloche 1 : OFFERTE PAR LA POPULATION NYONNAISE / LA PAROLE DE DIEU DEMEURE ETERNELLEMENT. PIERRE II, 25
Cloche 2 : DON DES DAMES DE LA PAROISSE DE NYON / GLOIRE A DIEU DANS LES CIEUX TRES HAUTS. LUC II, 14
Cloche 4 : CETTE CLOCHE REMPLACE CELLE DE 1797 FONDUE A GENEVE / BIENVEILLANCE ENVERS LES HOMMES. LUC II, 14. Note: un inventaire mentionné par le Conteur Vaudois en 1924 mentionne que cette cloche aurait été fondue par Dreffet (Pierre) de Vevey et non son cousin Jean-Daniel établi à Genève.
Cloche 6 : DON DES ECOLES DE NYON / DE LA BOUCHE DES ENFANTS TU TIRES TA LOUANGE. PS VIII, 3
La cloche 3 (1518) est la plus richement décorée. Elle arbore 10 motifs sous des arcades gothiques. On reconnaît Jésus portant la croix de même que certains apôtres. Inscription : Iiis maria eraclius paulus aquilinus arnicius alexander valerianus macrinus gordianus orate pro nobis mvxviii. (Jésus, Marie, huit noms de saints, priez pour nous, 1518). Note : les points de frappe de la cloche ont été rechargés en 2016
La cloche 5 (1446) arbore deux fois la Vierge à l’Enfant et deux fois le Christ de Pitié. On y lit aussi : IHS ANNO MILLESIMO CCCC XLVI AVE MARIA GRATIA PLENA DOMINUS TACOM. Note : le cerveau de la cloche a été réparé en 2016.
La cloche 7 (cloche d’horloge) présente des têtes d’angelots et des motifs floraux. Inscription : SOLI DEO GLORIA IG 1617

Quasimodo remercie chaleureusement
Annette Besson, architecte et cheffe de projet à la ville de Nyon
Victor Allaman, sacristain
France Richard, ancienne sacristine
Mes excellents amis campanaires Antoine Cordoba, carillonneur à Saint-Maurice, et Dominique Fatton, responsable technique des clochers de Val-de-Travers.

Sources
https://fr.wikipedia.org/wiki/Temple_de_Nyon
https://www.lacote-tourisme.ch/fr/P6661/temple-de-nyon
http://www.notrehistoire.ch/medias/101947
https://blogs.nyon.ch/archivistes/eclairage-sur-le-clocher-du-temple-de-nyon/
https://www.24heures.ch/vaud-regions/la-cote/orgue-1780-restaure-grand-maitre-artisan/story/26066408
« Le Conteur Vaudois » cahier no18, année 1924.
« Ville de Nyon, réhabilitation des deux cloches historiques du temple » dossier de presse par Fabienne Hoffmann, 17 mars 2016

Cloches – Villars-sur-Glâne (CH-FR) église Saints-Pierre-et-Paul

La métamorphose d’une sonnerie

-Cloche 1, note mi3 +11/100, diamètre 122cm, poids environ 1’100kg, coulée en 1960 par Ruetschi d’Aarau
-Cloche 2, note sol3 +35/100, diamètre 96cm, poids 520kg, coulée en 1840 par Louis Roelly de Fribourg
-Cloche 3, note si3 +10/100, diamètre 80.5cm, poids 330kg, coulée en 1838 par Louis Roelly de Fribourg
-Cloche 4, note ré4 -8/100, diamètre 67cm, poids 190kg, coulée en 1960 par Ruetschi d’Aarau
-Cloche 5, note sol4 -1/100, diamètre 51.5cm, poids 100kg, coulée vers 1350, non signée
(la3=435Hz, déviation en 1/100 de 1/2 ton) Présentation détaillée (inscriptions) plus bas

Nouveau beffroi de chêne, nouveaux jougs en bois, nouveaux battants, nouvelle motorisation… il fallait bien une nouvelle présentation de la sonnerie de Villars-sur-Glâne!

Une église aux origines obscures – La première mention d’une église à Villars-sur-Glâne remonte à 1156. D’habitude très prolyxe dans son Dictionnaire historique et statistique des paroisses catholiques du canton de Fribourg, Apollinaire Deillon avoue ne disposer que de peu de renseignements au sujet des édifices qui se sont succédé en ces lieux. Il est seulement question d’importantes rénovations en 1450 et en 1786. Lors de la démolition de 1915 furent mises au jour une fenêtre romane du XIIe siècle dans la nef ainsi que des feuilles de plomb indiquant que le clocher avait été reconstruit en 1754. Consacrée le 8 octobre 1916, l’imposante église Saints-Pierre-et-Paul est en forme de croix latine. Le coût des travaux, devisé à 150’000 francs, s’avéra au final inférieur aux prédictions, de quoi faire pâlir d’envie nos grands argentiers actuels ! Les plans sont l’œuvre de Frédéric Broillet (1861-1927), architecte et restaurateur d’art réputé, spécialiste de l’historicisme, comme en témoignent les églises de Cugy et d’Heitenried. Les vitraux dessinés par Henri Broillet ont été réalisés par la maison Kirsch & Fleckner. Signalons enfin l’orgue neuf du facteur Ayer-Morel à Vauderens.

Une sonnerie hétérogène typique de la région – Les ensembles campanaires fribourgeois ont cela de savoureux qu’ils ont été complétés au fil des siècles tout en conservant les anciennes cloches. C’est ainsi qu’on trouve dans le clocher de Villars-sur-Glâne deux cloches récentes (cl 1 et 4) coulées par Ruetschi d’Aarau en 1960. Sont également accrochées au beffroi deux œuvres de Louis Roelly de Fribourg réalisées en 1838 (cl3) et 1840 (cl2). Mention enfin à la pièce maîtresse de la sonnerie, la cloche no5, coulée au XIVe siècle. Non signée et non datée, ses décors rappellent beaucoup ceux de la deuxième cloche du sacristain de la cathédrale Saint-Nicolas de Fribourg. Il y a donc fort à parier que ces deux cloches soient l’œuvre du même fondeur. Au XIXe siècle déjà, on se rendait compte de la valeur historique de cette petite cloche médiévale : la cloche no2 arbore en effet cette affectueuse dédicace (en latin) la plus grande cloche a été faite pour que la plus petite, très ancienne, puisse être ménagée. Signalons aussi dans le clocher la présence d’une crécelle en bois, jadis utilisée pour appeler les fidèles durant le triduum pascal, ainsi qu’un mouvement horloger désaffecté. Même si le cadran de contrôle de cette belle méanique affiche Léon Crot – fabricant – Granges (Vaud), il faut savoir que cet horloger se contentait souvent d’assembler et de revendre des pièces fabriquées en France. Le mouvement de Villars-sur-Glâne est en fait un produit de la maison Prost/Paget à Morez (merci à Daniel Fonlupt, conservateur de la Maison des Horloges à Charroux). Insolite enfin, une petite cloche (diamètre 37cm) estampillée Burdin aîné de Lyon (fondeur inédit dans la région) déposée au premier étage du clocher. Cette cloche aurait sonné un temps dans le clocher de la chapelle des Daillettes, consacrée en 1945 et incendiée en 1979. Son joug calciné semble corroborer cette thèse. On ignore par contre quelle fut la première destination de cette petite cloche.

Présentation détaillée des cloches
-Cloche 1 : JE CHANTE LES LOUANGES DE MARIE DE L’ANGELUS DE L’AUBE A L’ANGELUS DU SOIR / FRANCOIS CHARRIERE, EVEQUE / DON DES PAROISSIENS / PARRAIN JOSEPH DREYER BLASER, PRESIDENT DE PAROISSE / MARRAINE MARIE ROUBATY-PYTHON / FONDERIE DE CLOCHES H. RUETSCHI S.A. AARAU 1960. Note : la cloche, de style moderne, porte l’effigie de la Vierge de l’Immauclée Conception sur un croissant de lune. Elle est aussi ornée des armoiries de Villars-sur-Glâne.
-Cloche 2 : PAROCHUS RDFNA WERRO /  PARRAIN MONSIEUR LE CAPITAINE JOSEPH DE RAEMY / MARRAINE MADAME MARIE-MADELEINE DE REYNOLD / IESUS MARIE JOSEPH / EXUSRGAT DEO ET DISSIPENTUR INIMITI EIUS / EX PECUNIIS A PAROCHIANIS VILLARIENSIBUS / PIA LIBERALITATE COLLATIS / CAMPANA MAIOR CONFECTA UT MINOREAQUE ANTIQUISSIMA ILLAESA MANEAT / ITAE CAMPANAE BENEDICTAE SUNT A CEL’S AC R D D PETRO TOB YENNI EPISC LAUSANNAE / FAITE PAR LS ROELLY A FRIBOURG 1840. Note : cloche de style néo-classique. Les anses sont garnies de mascarons masculins. Le col de la cloche porte une frise ornée de têtes d’anges et de flammes dressées. La robe arbore les effigies de la Sainte Famille et des apôtres Pierre et Paul.
-Cloche 3 : SIT NOMEN DOMINI BENEDICTUM / LAUDATE PUERI DOMINUM / LAUDATE NOMEN DOMINI / T R D NICOLAUS WERRO ERAT PAROCHUS / MONSIEUR IGNACE DE BUMAN PARRAIN / PHILIPPINE HELENE MADAME MARIE DE RAEMY NEE DE REYNONLD MARRAINE / GLORIA UN EXCELSIS DEO ET IN TERRA / PAX HOMINIBUS BONAE VOLUNTATIS / PIERRE PAUL APOTRES / ST NICOLAS / NOTRE DAME DE LOURDES. FAITE PAR LS ROELLY A FRIBOURG 1838. Note : de style néo-classique, cette cloche fut coulée en partie avec le bronze d’une ancienne cloche de 1609 pesant 470 livres. Les anses sont lisses mais la frise du col est identique à la cloche 2. Sur la robe, on trouve les effigies du Christ en croix, de Saint-Nicolas, de Notre-Dame de Lourdes et (comme sur la cloche 2) des apôtres Pierre et Paul.
-Cloche 4 : MON JOUG EST DOUX ET MON FARDEAU EST LEGER / DON D’ALFRED ET ALINE KOERBER A BULLE ET DE LOUIS KOERBER CURE / FONDERIE DE CLOCHES H. RUETSCHI AARAU. Note : la cloche, de style moderne, porte un bas-relief du Sacré-Coeur.
– Cloche 5 : +METE.. SACTA… SPOTANEA… DEO.. PRIE (mentem sanctam spontaneam honorem deo et patriae liberationem). Note : il s’agit d’une des cloches les plus anciennes du canton. Les Biens Culturels fribourgeois estiment qu’elle date de 1350 environ. Elle pourrait avoir été coulée par le même fondeur (inconnu) que la deuxième cloche du sacristain de la cathédrale de Fribourg
– Cloche déposée : BURDIN AINE FONDEUR A LYON 1891. Note : la cloche porte les effigies du Christ en croix et de la Vierge à l’Enfant.

Nature des travaux :
Les cloches étaient fortement encrassées. Les anciens moteurs de type Bochud perdaient en effet de l’huile qui a ruisselé et formé du cambouis au fil des ans. Le campaniste a commencé par nettoyer ces demoiselles de bronze avec soin, en prenant garde de préserver la patine des cloches historiques. Le beffroi et les jougs en acier de 1960 ont été démontés, de nouveaux jougs et une nouvelle charpente en chêne ont été réalisés. On peut lire sur cette dernière  cette phrase de Winston Churchill : Plus vous regarderez loin dans le passé, plus vous verrez loin dans le futur. Une maxime qui illustre de fort belle manière la longue et riche histoire de l’église et de la sonnerie. La motorisation (tintement et volée) de la sonnerie est neuve. Les nouveaux battants forgés sont en acier doux. Précisons qu’à l’heure où cet article est finalisé, d’autres travaux sont sur le point d’être menés : pose d’un plafond de bois dans la chambre des cloches pour en améliorer encore l’acoustique et l’aspect esthétique ; mise en place d’un dispositif d’éclairage nocturne de la chambre des cloches ; remplacement des cadrans d’horloge modernes de type « horloge de gare » par une reconstitution des cadrans d’origine (voir galerie photos d’archive plus bas). Sont encore à l’étude : la revalorisation de la petite cloche déposée et de l’ancien mouvement d’horloge. Un petit film de présentation des cloches de Villars-sur-Glâne est en cours de réalisation.

Galerie « archives ». Vous y trouverez des photos de l’ancienne église, de la nouvelle église avec ses anciens cadrans d’horloge et de la bénédiction  des cloches de 1960.

Mes plus vifs remerciements au Conseil de Paroisse de Villars-sur-Glâne pour sa confiance lors de ces importants travaux de restauration. Merci aux sacristains pour leur gentillesse et leur disponibilité. Merci aux campanistes de Mecatal, Jean-Paul Schorderet et son équipe, pour cette belle collaboration. Merci enfin à mes vaillants camarades campanaires sans qui l’enregistrement audio-vidéo n’aurait pas été possible : Antoine « Cloches74 » carillonneur à St Maurice et à Taninges, et Dominique « Valdom68 » responsable technique des clochers de Val-de-Travers.

Sources (autres que mentionnées plus haut)
Inventaire réalisé par les Biens Culturels de l’Etat de Fribourg
Le patrimoine campanaire fribourgeois, éditions Pro Fribourg (2002)
L’église centenaire de Villars-sur-Glâne 1916-2016, Michel Charrière, édité par la paroisse
https://www.villars-sur-glane.ch/fr/prive-par-theme/la-commune/historique/leglise-paroissiale-saints-pierre-et-paul.html
https://www.villars-sur-glane.ch/fr/prive-par-theme/la-commune/historique/la-chapelle-des-daillettes.html
http://www.hls-dhs-dss.ch/textes/f/F44717.php
http://www2.fr.ch/bcuf/Dynamic.aspx?c=2934
http://www3.orgues-et-vitraux.ch/default.asp/2-0-1687-11-6-1/

Cloches – Morges (CH-VD) temple réformé

Do# mi mi fa# !

-Cloche 1, note do#3 -55/100, coulée en 1821 par Louis Golay de Morges
-Cloche 2, note mi3 -26/100, coulée en 1645 par Michel Jolly et Nicolas Humbert, saintiers lorrains
-Cloche 3, note mi3 -37/100,  coulée en 1774 par Jean-Daniel Dreffet de Coppet établi à Genève
-Cloche 4, note fa#3 -32/100, coulée en 1778 par Jean-Daniel Dreffet de Coppet établi à Genève
(la3 = 435Hz, déviation en 1/100 de 1/2ton)

Le temple de Morges compte parmi les plus imposants et les plus beaux édifices baroques tardifs de Suisse romande avec le temple Pestalozzi d’Yverdon-les-Bains et l’église Saint-Laurent de Lausanne. Ces trois édifices ont la particularité de combiner à divers degrés des éléments architecturaux baroques et classiques. La construction du temple de Morges débute en 1769 sur des plans de l’architecte bernois Erasme Ritter. Mais en 1771, le clocher, plus imposant que sur les plans, s’affaisse, provoquant d’importants dégâts à la façade arrondie. On peut déplorer la perte d’une intéressante exception architecturale dans la région. Le chantier est poursuivi par le lausannois Rodolphe de Crousaz et le lyonnais Léonard Roux, membre associé de l’académie royale d’architecture et de l’académie de Lyon. Une nouvelle façade et un nouveau clocher sont érigés, ils reprennent avec goût les éléments sculptés de la précédente construction. La dédicace du temple a enfin lieu en 1776. Un an plus tard à peine, la tribune est réaménagée pour accueillir l’orgue. Le portail sud est réalisé en 1885. La chaire élaborée en 1786 est transformée en 1895. Les seuls vitraux sont ceux du chœur. Représentant les réformateurs Pierre Viret et Ulrich Zwingli, ils ont été confectionnés en 1896 par Wehrli de Zurich. L’orgue est un instrument Kuhn de 1951 occupant un buffet de 1896. Le buffet historique de 1778 est exposé au musée suisse de l’orgue à Roche. La table de communion (1634) et certains éléments des stalles proviennent de l’ancienne église, attestée dès 1306, et dont le chœur est reconstruit en 1508. Morges devient réformé en 1536.

Deux cloches égrenant la même note ! On peut s’étonner qu’Auguste Thybaud, l’infatigable accordeur de cloches vaudois, ne se soit pas manifesté ici. Cette particularité musicale pourrait suffire à elle seule à attirer l’attention du campanophile sur la sonnerie du temple de Morges. Ce n’est pourtant de loin pas le seul attrait de ces quatre cloches. La plus ancienne (cloche no2) est antérieure au temple. Elle a été coulée en 1645 par deux fondeurs originaires du Bassigny. Et là encore, l’attention du passionné s’éveille ! Cette région de Champagne-Ardenne n’est-elle pas réputée pour avoir engendré les meilleures lignées de saintiers ? Michel Jolly et Nicolas Humbert – car c’est d’eux qu’il s’agit – figurent dans de nombreux inventaires réalisés en Suisse romande. Certaines de leurs cloches ont hélas disparu. On pense notamment à l' »Accord » de la cathédrale de Genève, coulé en 1678 et refondu par Samuel Treboux de Vevey en 1845 (actuelle cloche no2 de Saint-Pierre). Heureusement que la magnifique cloche « Cloche des Trois Heures », coulée en 1674 pour la cathédrale de Lausanne nous est parvenue. Confectionnée par Michel Jolly et le Veveysan Jean Richenet, ce fruit d’une collaboration unique a été déplacé en 1898 à l’église Saint-François. Le clocher du temple de Morges renferme aussi deux cloches réalisées en 1774 et 1778 par Jean-Daniel Dreffet (1746-1817). Ce fondeur originaire de Coppet établi à Genève a essentiellement travaillé pour le canton de Vaud. Sa plus importante réalisation, une cloche de 1’200kg coulée en 1784, sonne toujours dans le clocher du temple de Baulmes. Jean-Daniel Dreffet  semble être le cousin germain de Pierre Dreffet (1752-1835) lui aussi fondeur de cloches, mais établi à Vevey. Cet inventaire du clocher du temple de Morges ne serait pas complet sans la grande cloche, coulée en 1821 par Louis Golay. Le fondeur local n’a eu qu’une production campanaire confidentielle si on le compare à son concurrent veveysan de l’époque. Il est toutefois intéressant de noter que des cloches Golay ont été recensées par le carillonneur savoyard Antoine Cordoba dans les clochers de Thollon et de Neuvecelle. Dans le canton de Vaud, on se souviendra longtemps encore de Louis Golay comme le constructeur de cette fameuse pompe à incendie qui sauva la cathédrale de Lausanne d’une destruction certaine en 1825. Deux mots enfin des cloches qui précédèrent celles qui chatouillent aujourd’hui les oreilles des Morgiens. La Revue Historique Vaudoise mentionne dans son édition de 1928 une cloche d’environ trente quintaux (1’500kg, ndlr) coulée en 1602 par Pierre Guillet de Romont avec le bronze de deux cloches plus petites. Il est également écrit qu’un certain Pierre Belfraire, serrurier à Romont, fut chargé de refaire les ferrures d’une autre cloche. Aucune des deux cloches mentionnées ne nous est parvenue. Le lanternon renferme encore deux petites cloches, vraisemblablement utilisées autrefois pour l’horloge. Leur accès est prohibé.

Les quatre cloches portent toutes des ornements et des inscriptions extrêmement soignés
-Cloche 1, tout au bas de la robe : AUJOURD’HUI QUE VOUS ENTENDEZ MA VOIX N’ENDURCISSEZ PAS VOS COEURS PROSTERNEZ-VOUS ET FLECHISSEZ LE GENOU DEVANT CELUI QUI VOUS A FAIT. La cloche porte aussi la signature de son fondeur dans un cartouche entouré de flammèches, d’angelots et de fleurs en bouquets FAIT PAR LOUIS GOLAY MAITRE FONDEUR A MORGES 1821. Figurent encore les armoiries de la ville et – au verso, sur la quasi-hauteur de la robe : MEMBRES DU CONSEIL MUNICIPAL Samuel GUEX syndic – A Louis DAPPLES – Samuel RENEVIER – Samuel MURET – Daniel BOURGEOIS – Abraham HUGONET – A Louis DEPETRA – J Henri WARNERY – Benjamin JAIN – François FOREL – J L E Henri MONOD – Emanuel WARNERY – Samuel GLAIRE – Samuel PACHE secrétaire – Benjamin DELLIENI inspecteur.
-Cloche 2, sur le col : PAR TA BONTE NON PAREILLE ENTRE PLUS AVANT AU COEUR QUE MON SON DEDANS L’OREILLE. Figure aussi, aux deux tiers de la robe, le nom – vraisemblablement – du donateur : SIEUR JEAN PAUL (… nom de famille caché par le marteau…) Mre CHIRURGIEN GOUVERNEUR 1645. Les anses, typiquement baroques, portent de superbes mascarons représentent des visages masculin affichant diverses émotions (rire, frayeur, colère)
-Cloches 3 et 4 : elles sont nettement moins bavardes en texte, mais de facture tout aussi soignée avec leurs frises de flammèches baroques. Toutes deux portent la signature de leur fondeur dans un cartouche entouré d’une cordelette et cerné de têtes d’angelots. On peut lire, pour la cloche 3 : FAITE PAR JEAN-DANIEL DREFFET MAITRE FONDEUR DE COPPET 1774. Variante – et c’est intéressant – pour la cloche 4, datée de 1778: GENEVE remplace COPPET !

Duo virtuel des deux cloches en mi. Arrive d’abord la cloche de 1645, rejointe quelques secondes plus tard par la cloche de 1774. On remarque bien la sonorité relativement classique de la première et les partiels baroques (prime très haute) de la seconde.

Les quatre cloches sont accrochées à leurs jougs en bois d’origine. La grande cloche est équipée en super-lancé, mode de volée plutôt rare dans la région. Bien que considérée comme cloche no2 dans l’ordonnance de sonnerie, la cloche de 1645 est légèrement plus aiguë que la cloche numérotée en 3. Son profil est par contre nettement plus lourd. Le clocher renferme encore une horloge mécanique Baer de Sumiswald datée de 1943 modifiée pour la synchronisation horaire par la maison Muri. Les quarts sont frappés sur les cloches 4 et 2, l’heure est tintée sur la grande cloche.

Quasimodo remercie chaleureusement :
Yves-Marc André, responsable des bâtiments de la ville de Morges
Marc Binggeli, chef de service
Jacques-André Henri, président du conseil paroissial Morges-Echichens
Giovanni Di Giacomo, concierge.
Merci aussi à mes excellents amis campanaires Antoine Cordoba, carillonneur à Saint-Maurice, et Dominique Fatton, responsable technique des clochers de Val-de-Travers.
Merci enfin à Matthias Walter, expert-campanologue à Berne, président de la GCCS, pour les précieux renseigements complémentaires.

Sources
https://fr.wikipedia.org/wiki/Temple_de_Morges
https://cloches74.com/
http://gtell.over-blog.org/article-la-fonderie-deux-cents-ans-de-vie-et-d-histoire-vaudoises-122109867.html
http://www.orgues-et-vitraux.ch/default.asp/2-0-1897-11-6-1/
Les fondeurs de nos cloches, Alfred Chapuis et Léon Montandon, extrait de la Revue Neuchâteloise, 1923
Les cloches du canton de Genève, A. Cahorn, 1921
Nos vieilles cloches, extrait de la Revue Historique Vaudoise, 1928
Panneaux d’information rédigés par la section monuments et site du canton de Vaud

Cloches – La Chaux-de-Fonds (CH-NE) église du Sacré-Coeur

Le bourdon au joug rompu se balance à nouveau

-Cloche 1, note si2 +3/100, diamètre 170cm, poids 3’030kg, coulée en 1927 par Ruetschi à Aarau
-Cloche 2, note ré#3 -9/100, diamètre 136cm, poids 1’471kg, coulée en 1927 par Ruetschi à Aarau
-Cloche 3, note fa#3 -11/100, diamètre 113cm, poids 894kg, coulée en 1927 par Ruetschi à Aarau
-Cloche 4, note sol#3 -7/100, diamètre 102cm, poids 655kg, coulée en 1927 par Ruetschi à Aarau
(la3=435Hz, déviation en 1/100 de 1/2 ton)

En octobre dernier, je vous faisais vivre sur les réseaux sociaux les mésaventures du bourdon du Sacré-Coeur de la Chaux-de-Fonds, dont le joug s’était rompu. Nombre de passionnés de cloches s’étaient émus de la destinée de cette grande cloche de trois tonnes. Il me paraissait donc tout naturel de vous offrir – enfin – une présentation complète de cette grand et bel ensemble campanaire, le deuxième par ordre de poids (6’050kg) du canton de Neuchâtel après Le Locle et ses cinq cloches d’un poids total de 6’893kg. Vous trouverez également dans cet article des coupures de presse et des photos d’époque.

La galerie ci-dessous vous permet de revivre l’épisode du joug rompu du bourdon et son remplacement (captures d’écran du reportage de Canal Alpha du 10 octobre 2017 et photos fournies par la maison Ruetschi)

Le culte catholique demeura longtemps interdit à la Chaux-de-Fonds. Alors que la première église y est consacrée en 1528, la Réforme et adoptée en 1536 par la siegneurie de Valangin. Ce n’est qu’en 1834 que la paroisse catholique chaux-de-fonnière  voit le jour. Une chapelle est ainsi construite en 1841, flanquée deux ans plus tard de la cure. La proclamation en 1870 du dogme de l’infaillibilité pontificale conduit à un schisme donnant le jour à l’Eglise catholique chrétienne, appelée parfois aussi Vieille Catholique. En 1875, les catholiques romains de la Chaux-de-Fonds se retrouvent sans lieu de culte. Ils commencent par investir une grange gracieusement prêtée par un paroissien. Une nouvelle chapelle voit le jour en 1877. Devenue trop exiguë, elle sera détruite pour laisser la place à l’actuelle église du Sacré-Coeur, consacrée le 17 décembre 1927. La messe inaugurale y a lieu le lendemain

 

 

Le Sacré-Coeur est la plus grande église de la Chaux-de-Fonds et l’un des plus vastes sanctuaires du canton de Neuchâtel. Son plan basilical à trois nefs n’est pas sans rappeler Notre-Dame de Neuchâtel (la fameuse « église rouge »), à la différence près que nous n’avons ici pas de transept. La décoration est aussi moins chargée. Construit de 1925 à 1927 en pierres de taille selon des méthodes traditionnelles, ce sanctuaire néogothique – un des derniers du style à avoir été construit en Suisse – dispose d’intéressants vitraux élaborés par les ateliers fribourgeois Kirsch & Fleckner. Et c’est à un autre fribourgeois, Wolf-Giusto, que l’on doit le grand orgue, restauré en 1995 par la Manufacture d’orgues de Chézard-St.-Martin. Les artistes locaux ne sont pas en reste : les vitraux modernes sont du peintre Georges Froidevaux (1911-1968) né et décédé à la Chaux-de Fonds. C’est le peintre et tapissier chaux-de-fonnier Claude Loewer (1917-2006) qui réalisa la grande fresque colorée représentant le baptême du Christ à l’arrière de la nef. Il est intéressant de noter que l’église du Sacré-Coeur se situe Rue du Doubs, entre le temple Farel (ancienne église évangélique libre) et le temple allemand, aujourd’hui désaffecté. Les trois sonneries, disposant chacune de quatre cloches coulées par la maison Ruetschi, ont été conçues tour à tour pour s’accorder ensemble : accord complété en la bémol 3 pour le temple allemand (1881), accord majeur parfait en ré bémol 3 pour le temple Farel (1882), Salve Regina en si2 pour le Sacré-Coeur (1927).

Détails des cloches
-Cloche 1, porte l’effigie du Sacré-Coeur de Jésus. « Don de plusieurs paroissiens et paroissiennes dont le principal, celui de M. Jean Crivelli, architecte de cette église »
-Cloche 2, porte l’effigie de Marie. « Don de Mademoiselle Louise Gobet »
-Cloche 3, porte l’effigie de Saint-Joseph. « Don de Madame Augustine et M. Fortuné Barnaverain »
-Cloche 4, porte l’effigie de l’Assomption de la Vierge. « Don de Madame Marie-Thérèse et M. le Dr. Louis Jobin »

Cliquez sur la galerie archives ci-dessous ! Vous y trouverez des coupures de presse d’époque du journal local l’Impartial. Montée des cloches (article du 7 octobre 1927), bénédiction des cloches (paru le 3 octobre 1927), présentation de l’orgue (datée du 1er novembre 1927). Je vous ai également glissé une photo datée de 1926 montrant la construction de l’église, et plus spécialement l’élaboration des voûtes en ogive (Collection Bibliothèque de la ville de La Chaux-de-Fonds, Département audiovisuel). J’y ajoute enfin des photos de la montée des cloches aimablement fournies par la paroisse.

Quasimodo remercie:
M. l’Abbé Jean-Claude Dunand, curé modérateur de l’UP des Montagnes pour son aimable autorisation et son chaleureux accueil.
M. Maurice Perroset, responsable des bâtiments de la paroisse du Sacré-Coeur, pour les belles archives fournies
La maison Ruetschi : René Spielmann, directeur, et Tom Zingrich, campaniste
Dominique « Valdom 68 » Fatton, responsable technique des clochers de Val-de-Travers, et Allan Picelli, sacristain à Maîche, pour leur précieux concours et les moments d’amitié

Sources
http://www.imagesdupatrimoine.ch/notice/article/une-nouvelle-eglise-pour-les-catholiques-de-la-chaux-de-fonds.html
http://cdf-bibliotheques.ne.ch/bvcf/patrimoine/archives-fonds-speciaux/archives-associations/Pages/eglise-catholique-chretienne-du-canton-de-neuchatel.aspx
http://www.orgues-et-vitraux.ch/default.asp/2-0-142-6-6-1/
http://www.sikart.ch/
Archives du journal l’Impartial
Archives de la chaîne de télévision Canal Alpha
Archives de la fonderie Ruetschi

Cloches – Villarvolard (CH-FR) église Saint-Sulpice

Réparée, la « Cloche des Jeunes » redonne de la voix dans le plénum augmenté à six cloches

-Cloche 1, note si2 +45/100, coulée en 1892 par Gustave Treboux de Vevey
-Cloche 2, note mi3 +58/100, coulée en 1892 par Gustave Treboux de Vevey
-Cloche 3, note fa#3 -1/100, coulée en 1892 par Gustave Treboux de Vevey
-Cloche 4, note sol#3 +23/100, coulée en 1892 par Gustave Treboux de Vevey
-Cloche 5, note si3 +55/100, coulée en 1892 par Gustave Treboux de Vevey
-Cloche 6, note si4 +49/100, date de coulée estimée au XIIIe siècle
(la3 = 435Hz, déviation en 1/100 de 1/2 ton)

L’histoire de la paroisse de Villarvolard débute au XIIIe siècle après sa séparation de celle Broc. C’est aussi à cette époque que fut construite une première église, de dimensions fort modestes. Ce vénérable petit édifice existe toujours, il abrite aujourd’hui l’administration scolaire après avoir été tour à tour le four banal et l’office de poste du village. L’actuelle église Saint-Sulpice, consacrée le 15 juillet 1760, eut à subir de profondes transformations au fil des ans. La fin du XIXe siècle signifia l’installation d’un nouveau plafond en plâtre en remplacement du beau plafond étoilé en bois, mais aussi de nouveaux vitraux, de nouveaux autels latéraux et d’un nouvel orgue avec sa tribune. Le séisme de 1946 provoqua l’écartement des murs. Il fut alors mené une restauration d’un goût douteux : le plafond de plâtre fut remplacé par de l’aggloméré. Il fallut attendre 1994 pour que l’église de Villarvolard retrouve tout son cachet historique. Trône encore aujourd’hui dans le chœur le magnifique maître-autel élaboré en 1780 par Dominique Martinetti, sculpteur italien établi à Fribourg. Le tableau central représente Notre-Dame du Saint-Scapulaire et Sainte Thérèse d’Avila. Au-dessus se trouve une toile représentant Saint François d’Assise, Sainte Françoise Romaine et Sainte Agnès. De part et d’autre se dressent les statues de Saint Sulpice et de Sainte Catherine d’Alexandrie.

Le clocher original du XVIIIe siècle dut céder sa place à la fin du XIXe à l’actuelle tour, plus robuste, érigée pour accueillir la sonnerie monumentale réclamée de longue date par les paroissiens. Y prirent place cinq nouvelles cloches coulées par Gustave Treboux de Vevey. Leur coulée fut endeuillée par la mort d’un jeune manœuvre (voir article de presse plus bas). Une petite cloche (actuelle cloche no6) coulée au XIIIe siècle, vraisemblablement pour la première église dont elle est contemporaine, annonce aujourd’hui encore les décès dans la paroisse (cloche de l’Agonie, coutume typiquement fribourgeoise). Il s’agit d’une des cloches les plus anciennes du canton. Ses anses ont été stupidement sectionnées il y a quelques décennies. J’ai choisi de la faire exceptionnellement sonner avec ses jeunes sœurs pour la présentation vidéo. La cloche no5 était depuis longtemps désaffectée. Surnommée « Cloche des Jeunes », elle avait pour pénible mission de sonner (à la corde) lors des obsèques d’un enfant. Cette cloche souffrait en outre de graves défauts de coulée à la pince et aux anses. L’entreprise Mecatal l’a entièrement restaurée dans son atelier de Broc (CH-FR). Le campaniste a également procédé aux travaux suivants : confection de nouveaux jougs de chêne pour les cloches 1,2,3 et 6, restauration des jougs des cloches 4 et 5, nouvelle motorisation, nouveaux tinteurs et nouveaux battants pour les six cloches. Les quarts sont tintés sur les cloches 5, 4 et 3, les heures sont frappées (avec répétition après deux minutes) sur le bourdon. La cloche 2 sonne les angélus. Une ancienne horloge électro-mécanique Mamias, désaffectée, subsiste encore dans le clocher.

Inscriptions
-Cloche 1 « JE SUIS LA FOI » Parrain Léopold Clerc, marraine Ursule Savary née Premat
-Cloche 2 « JE SUIS L’ESPERANCE  » Parrain Louis Dupré, marraine Louise Drompt Brodard
-Cloche 3 « JE SUIS LA CHARITE » Parrain Thadde Repond, marraine Angéline Repond-Dupré
-Cloche 4 « JE SUIS L’IMMACULEE » Parrain Polycarpe Schouwey, marraine Séraphine Schouwey
-Cloche 5 « JE SUIS L’INNOCENCE ET LA JOIE » Parrain Louis Jaquet, marraine Marie Gillard

« La Liberté » du 27 juillet 1892, accident mortel lors de la coulée des cloches de Villarvolard

Quasimodo remercie
L’entreprise Mecatal, Jean-Paul Schorderet et son équipe, pour m’avoir offert de suivre cette superbe restauration
La paroisse de Villarvolard, Edouard Remy, conseiller paroissial et ancien président, pour le chaleureux accueil
Mes excellents amis campanaires Antoine « Les Cloches Savoyardes » Cordoba, carillonneur à Saint-Maurice et Taninges, et Dominique « Valdom 68 » Fatton, responsable technique des clochers de Val-de-Travers, pour leur indispensable collaboration

Sources
« Eglise de Villarvolard, restauration 1994-1996 » de Yvonne Romanens-Charrière
« Le patrimoine campanaire fribourgeois », éditions Pro Fribourg, 2012

Cloches – Attalens (CH-FR) église Notre-Dame de l’Assomption

Huit siècles d’histoire campanaire dans ce clocher néogothique !

– Cloche 1, Marie-Françoise, mib3 -52/100, Antoine Livremont, Pontarlier,1766
– Cloche 2, Sainte Madeleine, solb3 -45/100, Pierre Dreffet & Marc Treboux, Vevey, 1821
– Cloche 3, Cloche du Souvenir, lab3 +12/100, Pierre Dreffet & Marc Treboux, Vevey, 1821
– Cloche 4, « Tout Amour », sib3 -18/100, Pierre Dreffet & Marc Treboux, Vevey, 1821
– Cloche 5, Cécile, réb4 +17/100, Ruetschi, Aarau, 1964
– Cloche 6, lab4 +40/100, 13e siècle
Diapason : la3 = 435Hz, déviation en 1/100 de 1/2 ton

La première mention d’une église dédiée à la Vierge, propriété de l’abbaye de St Maurice, remonte à 1068. Construite de 1860 à 1863 sur les plans de l’architecte Adolphe Fraisse, figure de proue de l’historicisme à Fribourg, l’église Notre-Dame de l’Assomption d’Attalens est une des grandes et belles églises néogothiques de la région. Elle fut consacrée en 1863 par Mgr Etienne Marilley. Elle remplace un ancien édifice de 1453, situé alors vers le château. Le mobilier liturgique, réalisé en plusieurs étapes, est d’une grande richesse. Les autels latéraux sont dédiés à Notre Dame du Rosaire et Saint Nicolas de Flue. Sur un projet de l’architecte Théodore Perroud de Fribourg, ils furent réalisés par le marbrier David Doret de Vevey. Ils reçurent les tableaux peints par Melchior Paul Deschwanden de Stans. Le sculpteur Louis Gaud de Genève réalisa la chaire. Les décors polychrome, admirablement reconstitués, sont de Charles Carlen & Fils de Quarona Sesia (Piémont). L’édifice fut restauré en 1937 par Fernand Dumas. De cette époque datent les vitraux d’Alexandre Cingria et le décors polychromes du choeur par Paul Landry. D’autres restaurations apportèrent leur lot d’éléments artistiques : en 1960 fut réalisé le dernier repas de Jésus, œuvre en deux tableaux de Charles Cottet, enfant de la paroisse. L’orgue Savoy de Crévy (40 jeux avec 3 claviers et un pédalier) fut tour à tour mécanique, pneumatique, puis enfin électrique, suite aux travaux menés par la maison Ziegler en 1956. Selon Jean-Jacques Gramm, conservateur du Musée suisse de l’Orgue à Roche, l’instrument fut longtemps classé meilleur orgue du canton après celui de la cathédrale de Fribourg. Arrachée par la tempête Lothar pendant la messe du 26 décembre 1999, la flèche fut reconstruite à l’identique. Le nouvel autel a été consacré par Mgr Bernard Genoud le 5 septembre 2004.

Dans le haut clocher flanqué de 4 tourelles se balancent 6 cloches, coulées entre le XIIIe et le XXe siècle. Décorée de 2 seuls filets, la petite cloche, qui ne sonne officiellement que le jour de la Toussaint, est une des plus anciennes du canton. Aux accents typiquement baroques du grand mi bémol 3 d’Antoine Livremont, virent s’ajouter au XIXe siècle les voix de 3 cloches de la fonderie veveysanne toute proche, dirigée à l’époque conjointement par Pierre Dreffet et son neveu Marc Treboux. Une sixième cloche de chez Ruetschi vint compléter la sonnerie en 1964, commémorant dignement les 100 ans de la consécration de l’église.

Inscriptions sur les cloches :
-Cloche 1 : « Je m’appelle Marie-Françoise, je suis vouée au très saint nom de Jésus, à la sainte Vierge, à saint François et à sainte Françoise. Je chante les œuvres de Dieu, j’écarte les orages, je pleure les deuils, que le peuple de Dieu unisse son coeur à ma voix. François Gotreau, jadis chancelier, actuellement bailli d’Attalens et Françoise née Renevey son épouse, m’ont assisté au baptême en 1766 »
-Cloche 2 : « Je suis vouée à sainte Madeleine. Sion a entendu et s’est réjoui, les filles de Judée sont dans l’allégresse. Parrain: Pierre Dewarrat curé, la Tour de Trême. Marraine: Marie Gabriel. »
-Cloche 3 « Mon souvenir passera aux générations de tous les siècles. Parrain: Français Cottin. Marraine: Cédile Musy.
-Cloche 4 : « Tout amour. A la plus grande gloire de Dieu. Parrain: Jean-Nicolas Gillard. Marraine: Rosalie Musy. »
-Cloche 5 : « Je m’appelle Cécile. Je célèbre le centenaire de l’église d’Attalens. Ma voix se mélange aux chants de la cécilienne. M’ont présentée à la bénédiction donnée par Jean Dumont curé en l’an de grâce 1968, Joseph Cottet président de paroisse Amédée Pachoud président de la Cécilienne. »
-Cloche 6 : sans inscriptions.

Mes plus vifs remerciements à :
-Myriam Rossier, présidente de paroisse.
-Frédéric Perroud, responsable des bâtiments.
-Mes excellents camarades campanaires Antoine Cordoba, carillonneur à Saint-Maurice, et Dominique Fatton, responsable des clochers de Val-de-Travers, pour leur indispensable collaboration.

Sources :
« Dictionnaire historique et statistique des paroisses catholiques du canton de Fribourg », volume 1, par le Père Apollinaire Deillon, imprimerie du chroniqueur suisse, 1884
« Le patrimoine campanaire fribourgeois », éditions Pro Fribourg, 2012
http://www.upstdenis.ch/attalens/lieux-de-culte-de-la-paroisse/eglise-dattalens

Cloches – Avry-devant-Pont (CH-FR) église Saint-Martin

Deux cloches Bournez de Morteau première génération et une cloche fribourgeoise du XVIIe siècle

-Cloche 1, note ré3 -8/100 , dédiée à la Vierge Marie et à Saint Martin, coulée en 1797 par François-Joseph Bournez aîné de Morteau
-Cloche 2, note fa3 +43/100, coulée en 1801 par François-Joseph Bournez aîné de Morteau
-Cloche 3, note la bémol 3 +16/100, coulée en 1611 par Jakob Kegler le jeune de Fribourg.
(la3 = 435Hz, déviation en 1/100 de 1/2 ton)

Avry… le nom viendrait de l’adjectif latin apricus qui signifie exposé au soleil. On ne saurait en effet mieux définir la situation d’Avry-devant-Pont, accrochée aux contreforts du Mont-Gibloux avec sa vue imprenable sur les Préalpes et le lac de la Gruyère. Depuis le 1er janvier 2003, le village fait partie de la commune de Pont-en-Ogoz, au même titre que le Bry et Gumefens. L’histoire du lieu est évidemment bien plus ancienne : La paroisse d’Avry est mentionnée pour la première fois en 1177. La visite pastorale de 1453 recense une église on ne peut plus rudimentaire, rapporte Deillon dans son dictionnaire des paroisses : (l’église, ndlr) n’avait pas de sacristie ; autour du tabernacle, les murs n’étaient pas crépis ni aplanis. noircis (…) Il n’est pas parlé de la tour, elle n’existait probablement pas, une ou deux petites cloches étaient évidemment placées au sommet du frontispice de l’église. Il fallut tout de même attendre 1636 pour que soit bâtie une deuxième église. L’actuel édifice est le troisième à accueillir les paroissiens d’Avry-devant-Pont. Il fut consacré le 5 mai 1833. Remarquables sont les vitraux de l’artiste fribourgeois Henri Broillet (1891-1960). L’orgue, de construction récente, est l’oeuvre de la manufacture Ayer-Morel à Vauderens.

Le clocher renferme seulement trois cloches. Je dis « seulement », car la grande majorité des églises fribourgeoises disposent d’au minimum quatre cloches. La plus petite est aussi la plus ancienne : dédiée à Saint Pierre, elle porte la date de 1611 et la signature de Jakob Kegler le jeune. On doit à ce fondeur les deux timbres de l’Hôtel de Ville de Fribourg, de même que  la grande cloche de Marly (do#3, 1645) sa plus importante réalisation. Les deux autres cloches ont été réalisées à quelques années d’intervalle par François-Joseph Bournez aîné de Morteau. La plus grande, coulée en 1797, présente d’importants défauts de coulée (craquelures sur le col et la robe, crevasses sur son cerveau). Sa sonorité est toutefois plus qu’honorable. Elle arbore les inscriptions suivantes : CETTE CLOCHE A ETE BENIE A L’USAGE DE L’EGLISE D’AVRY-DEVANT-PONT SOUS LE VOCABLE DE L’AUGUSTE MERE DE DIEU ET DE ST MARTIN LE 21 NOVEMBRE 1797. PARRAIN LE SR JEAN ANTOINE BERBAUM D’AVRY. MARRAINE MLL MARIE DEPREX DE GUMEFENS. FAITE PAR FRANCOIS JOSEPH BOURNEZ DE MORTEAU 1797. La cloche no2 arbore le signature de François-Joseph Bournez dans un médaillon surmonté d’une guirlande. La date est incomplète : le dernier chiffre a en effet été rendu illisible par la frappe du marteau des quarts d’heure. Toutefois, Deillon – qui a fait son inventaire avant que la cloche ne soit tournée – la mentionne comme étant de 1801. De conception plus soignée que sa sœur aînée, cette cloche arbore simplement les noms de ses parrain et marraine : FRANCOIS GIRARD DE FRIBOURG, CURE et ELISABETH CASTELLA DE VILLARDIN NEE D’AFFRY. Le beffroi est en chêne, mais les cloches sont accrochées à des jougs en acier de type Bochud. Les battants piriformes sont vraisemblablement contemporains à la motorisation de la sonnerie. Cette dernière a dû être réalisée en 1955, date de livraison de l’horloge mécanique à remontage électrique des poids signée Baer de Sumiswald. Les quarts sont tintés sur les cloches 3 et 2, l’heure est frappée sur la grande cloche.

Mes plus vifs remerciements à la paroisse d’Avry-devant-Pont et à son président François Barras pour l’aimable autorisation. Merci à Mme Marjorie Fragnière, sacristine, pour le chaleureux accueil. Amitiés à mes excellents camarades campanaires Antoine Cordoba, carillonneur à Saint-Maurice, et Dominique Fatton, responsable technique des clochers de Val-de-Travers.

Sources :
Dictionnaire historique et statistique des paroisses catholiques du canton de Fribourg volume 1, Père Apollinaire Deillon, Imprimerie du chroniqueur suisse, 1884.
Le patrimoine campanaire fribourgeois, éditions Pro Fribourg, 2012
http://www.orgues-et-vitraux.ch/default.asp/2-0-2341-11-6-1/
https://www.pont-en-ogoz.ch/fr/accueil-histoire.html

Cloches – Bienne (CH-BE) église réformée Saint-Etienne

La plus ancienne église de Bienne dévoile sa sonnerie

-Cloche 1, note la bémol 3, diamètre 97cm, poids 520kg, coulée en 1872 par Ruetschi à Aarau
-Cloche 2, note do4, diamètre 78cm, poids 270kg, coulée en 1871 par Ruetschi à Aarau
-Cloche 3, note mi bémol 4, diamètre 65cm, poids 160kg, coulée en 1871 par Ruetschi à Aarau

L’église – C’est le plus ancien sanctuaire de la ville de Bienne et l’un des plus vénérables monuments de la région. L’histoire du site débute au IVe siècle par la construction d’un mausolée à plan rectangulaire situé le long d’une voie très fréquentée. Ce mausolée est transformé au VIIe siècle, puis remplacé par une première église un siècle plus tard. Une seconde église – romane – est édifiée à sa place entre le XI et le XIIe siècle. Détruite par un incendie, l’abside romane est reconstruite dans le style gothique entre les XIII et XIVe siècles. Certaines traces de ce riche passé sont encore bien visibles : sur la façade sud, deux petites fenêtres à arc en plein cintre témoignent de la nef romane toujours existante. Dans le chœur gothique légèrement désaxé se trouvent les restes d’une peinture murale remontant à la première moitié du XIVe siècle. On aperçoit également une niche à tabernacle et des fonds baptismaux remontant au début du XVIe siècle. Signalons enfin un cycle de quatre vitraux datés de 1688 représentant les armoiries des villes de Bienne et de Berne, du bourgmestre biennois Abraham Scholl et du trésorier du Pays allemand Johann Rudolf Tillier. Le clocher néogothique fut élevé en 1871 en remplacement d’un clocheton attesté dès le XIIIe siècle.

Les cloches – L’église Saint-Etienne possède le plus petit ensemble campanaire de la ville, mais aussi un des plus charmants. Les trois cloches portent des ornements très soignés semblables à ceux des cloches de Saint-Benoît coulées en 1882. Le col arbore une frise florale, alors que le haut de la robe laisse apparaître une guirlande de gâbles néogothiques. La panse est ornée d’une double rangée de cordons boutonnés ponctuellement par des fleurs. Les inscriptions des cloches résument en allemand, et de manière poétique, la longue histoire de la vénérable église Saint-Etienne. On apprend aussi qu’en 1871, Mâche comptait 722 âmes et Madretsch 868. A noter que ces anciennes communes font partie intégrante de Bienne depuis 1920. Il est enfin indiqué sur la grande cloche qu’elle est arrivée dans le clocher en 1872, un an après ses petites sœurs. Les voix cristallines de ces trois jolies demoiselles de bronze égrènent les notes la bémol 3, do 4 et mi bémol 4 (accord majeur). Le beffroi, les jougs et les ferrures sont contemporains des cloches. La demie est tintée sur la cloche 2, l’heure est frappée sur la grande cloche. Il n’y a pas de frappe des quarts. Le poids total des trois cloches est de 1’228kg. Elles ont toutes trois été coulées à Aarau par Ruetschi (Emanuel, deuxième génération).

Quasimodo remercie :
-Luc Ramoni, pasteur à l’église réformée de Bienne, pour les contacts
-Doris Horisberger, sacristine, pour son aimable accueil
Antoine Cordoba, carillonneur à Taninges, et Dominique Fatton, responsable technique des clochers de Val-de-Travers, pour leur indispensable collaboration et les moments d’amitié

Sources
https://www.erz.be.ch/erz/de/index/kultur/archaeologie/publikationen/informationsflyer.assetref/dam/documents/ERZ/AK/de/Archaeologie/ADB_Flyer_Biel-Mett_fr_2017.pdf
Archives de la maison Ruetschi

Cloches – Nidau (CH-BE) église réformée Saint-Erhard

La savoureuse sonnerie du clocher penché

-Cloche 1, note do#3, diamètre 153cm, poids environ 2’100kg, coulée en 1949 par Ruetschi d’Aarau. Inscription « Wo der Geist des Herrn ist, da ist die Freiheit »
-Cloche 2, note mi3, diamètre 120cm, coulée en 1809 par Franz Ludwig Kaiser de Soleure
-Cloche 3, note la3, diamètre 108cm, coulée en 1466. Inscription « Ave Maria gratia plena dominus teceum »
-Cloche 4, note si3, diamètre 80cm, coulée en 1810 par Franz Ludwig Kaiser de Soleure. Inscription : « Frantz Ludwig Kaiser Burger von Solothurn hat mich gegossen, Albrecht Pagan Amtschreiber zu Nidau hat mich umgiessen lassen im Jahre 1810 »

L’église – La paroisse de Nidau se détache de Bürglen en 1482. La Réforme est proclamée en 1528. Des travaux de rénovation sont effectués entre 1607 et 1611 sous la direction du contremaître de la cathédrale de Berne Daniel II. Heintz. En 1678, on assiste à la reconstruction du chœur et de la nef. L’Etat de Berne, de même que les communes voisines d’Ipsach et Belmont, participent aux frais qui se montent à 1’400 livres. Les stalles et la chaire datent de 1771. Trois importantes rénovations sont menées successivement au XXe siècle. Pour des raisons financières, les vitraux originaux représentant les armoiries de la ville et le blason du bailli sont cédées au musée de Berne. Un nouvel orgue de la manufacture Kuhn (21 jeux) est inauguré le 3 décembre 2017.

Le clocher – Ce n’est pas une illusion d’optique, il penche vraiment vers le nord ! Construite au début du XVIIe siècle sur des pilotis en raison d’un terrain marécageux, la tour a commencé à s’incliner après la correction des eaux du Jura. Ce chantier gigantesque, mené à partir de 1868, a asséché les terres jadis baignées des flots du lac et de l’Aar. Afin de contrer cet inquiétant phénomène d’inclinaison, la base du clocher a été enrobée d’un socle de béton. Les cloches, qui se balançaient jadis dans le sens nord-sud, sonnent aujourd’hui dans l’axe est-ouest. Si la partie en maçonnerie du clocher est penchée, la flèche – elle – est rigoureusement droite, ce qui accentue le côté pittoresque de l’ensemble.

Les cloches – Ce n’est pas la plus grande sonnerie de la paroisse réformée de Bienne, mais c’est peut-être la plus savoureuse. C’est en tout cas la plus intéressante sur le plan historique. Nous avons en effet ici quatre cloches coulées à trois périodes différentes. Toutes présentent des décors et des caractéristiques sonores typiques de leur époque. Alors que la cloche 3 – de facture gothique – n’arbore qu’une modeste ligne d’inscriptions sur son col, les cloches 2 et 4, réalisées au début du XIXe siècle, arborent de généreuses frises néo-classiques et de très belles anses baroques à mascarons. On peut aussi admirer sur la petite cloche le blason familial du greffier de Nidau Albrecht Pagan qui offrit la petite cloche en 1810. La cloche 2, elle, porte les armoiries de la ville. Elle a subi un accordage par alésage dans le but d’abaisser sa note afin qu’elle s’accorde avec ses 3 sœurs. La grande cloche est venue compléter la sonnerie en 1949. Le beffroi est métallique. Les 4 cloches sont disposées dans deux travées sur deux niveaux. Elles sont accrochées à des jougs en acier légèrement cintrés en raison de l’exigüité de la chambre des cloches. On citera encore la cloche de la chapelle voisine, coulée au XVIIe siècle par Abraham Gerber de Berne. Cette cloche est la relique d’une des portes de la ville. Elle était malheureusement hors service et inatteignable lors de ma visite.

Mes plus vifs remerciements à Luc Ramoni, pasteur à l’Eglise réformée de Bienne.

Sources
https://vitrosearch.ch/fr/buildings/2262235
http://www.hls-dhs-dss.ch/textes/f/F446.php
Documents aimablement fournis par Hugo Liechti, sacristain. Remerciements chaleureux à lui !