Archives de catégorie : CH-Fribourg

Cloches – Romont (CH-FR) collégiale Notre-Dame de l’Assomption

Dotées d’un nouvel équipement, les cloches de la collégiale de Romont sont désormais dix, et non plus neuf, à donner de la voix pour les grandes fêtes.

C’est une des sonneries les plus imposantes de Suisse romande, mais aussi une des plus riches sur le plan historique, qui se cache sur les hauteurs de la colline de Romont. Alors qu’elles n’étaient jusqu’en 2016 que neuf, elles sont aujourd’hui dix cloches à résonner pour les solennités. La cloche no 10, désaffectée depuis les années 1930, a enfin retrouvé du service. Et contrairement à ce qu’on jugeait au XXe siècle, elle s’accorde parfaitement avec ses sœurs !

Une collégiale de style gothique rayonnant – C’est vers l’an 1240 que débuta la construction de la collégiale Notre-Dame de l’Assomption de Romont. Si l’incendie de 1270 ralentit les travaux, ceux-ci eurent vite fait de reprendre, de sorte que la bénédiction put se dérouler en 1296. Mais en 1434, un nouvel incendie, plus important celui-là, ravagea la cité et détruisit une bonne partie du sanctuaire. C’est finalement en 1456 que la collégiale prit plus ou moins la forme que nous lui connaissons actuellement, dans le style gothique rayonnant. Le Calvaire qui surmonte la grille du chœur montre le Christ en croix (XVe siècle) encadré par la Vierge et Saint-Jean (fin du XVIIe). Les stalles ont été sculptées en 1464.  La chapelle du Portail abrite une sculpture de la Vierge à l’Enfant de la fin du XIIIe siècle. Et comment oublier les vitraux ! Les superbes œuvres médiévales côtoient une verrière consacrée à la Vierge de la fin du XIXe siècle au chœur, les douze apôtres d’Alexandre Cingria (1938) dans les fenêtres hautes de la nef, le cycle marial de Yoki (1968) dans la chapelle du Portail, et les prophètes de Sergio de Castro (1981). Notons enfin le décor peint des voûtes imaginé par Cingria et réalisé par Yoki.

Evidemment que les cloches antérieures à l’incendie de 1434 ne nous sont pas parvenues. En 1476, les Fribourgeois emportèrent plusieurs cloches comme butin de guerre suite à la bataille de Morat. La cloche 6 échappa miraculeusement à ce pillage. Tourmentée est également l’histoire du grand bourdon, coulé une première fois en 1520 par Nicolas Balliet. Jugé de qualité trop médiocre, il fut renvoyé au four en 1577. Mais c’est une cloche déjà fêlée qui fut présentée au Conseil par Jacques Guillet et Jean Barge. C’est finalement Franz Sermund, le fondeur bernois bien connu (on lui doit le bourdon de la cathédrale de Lausanne et la cloche de midi de la cathédrale de Berne), qui coula le magnifique si bémol2. Ce bourdon en profil ultra-lourd, avec ses 5’700 kg, se trouve être la 2e plus grosse cloche du canton, après le sol2 de la cathédrale de Fribourg (7’000kg). Quatre nouvelles cloches sont arrivées de la fonderie Ruetschi en 1931. Leurs décorations sont l’œuvre de Gino Severini, grand ami de Picasso. Elles semblent remplacer plusieurs cloches gothiques, dont la cloche de midi, datée de 1507. Cette cloche avait déjà dû être refaite successivement par Jacolet de Payerne en 1836 (très vite fêlée) et François Bulliod de Carouge en 1838. On admirera les décors particulièrement soignés des cloches 8 et 9. Leur métal fut fourni gratuitement par Fribourg, à la condition expresse de voir figurer les noms de Leurs Excellences, de même que les armes du Saint-Empire et celles de la ville. La cloche 9, amputée de ses anses vraisemblablement au XIXe siècle, s’est vu offrir – à l’occasion de ces travaux de rénovation – de nouvelles « oreilles » dans l’esprit de sa contemporaine.

(>> voir l’ancien équipement de la sonnerie)

-Cloche 1, bourdon, sib2, Franz Sermund, Berne, 1579, diamètre 200cm, poids environ 5’700kg
-Cloche 2, ré3, Claude de Genève, 1510, diamètre 157cm
-Cloche 3, cloche de midi, mib3, Ruetschi, 1931
-Cloche 4, cloche du Clergé, fa3, Ruetschi, 1931
-Cloche 5, cloche de Ste Thérèse, sol3, Ruetschi, 1931
-Cloche 6, la3, Guillaume Chaufornier, 1434
-Cloche 7, cloche de St Pierre Canisius, sib3, Ruetschi, 1931
-Cloche 8, do4, 1495
-Cloche 9, fa4, 1495
-Cloche 10, lab4, début du XVIe siècle
[Dans le clocheton occidental: cloche de l’Agonie, lab4, Joseph Klely, 1736]

La grande rénovation de la sonnerie, effectuée entre l’été et l’hiver 2016 par la maison Mecatal de Broc, a consisté à :
-Rendre ses anses à la cloche 9.
-Remettre en service la cloche 10, muette depuis 1931.
-Confectionner un joug en chêne pour la cloche 2, accrochée depuis sa motorisation à un rail en acier de type « Bochud ».
-Rénover, voire refaire certains des jougs en bois vétustes et leurs ferrures dans l’esprit historique.
-Equiper toutes les cloches de nouveaux battants en acier doux à chasse courte et d’une nouvelle motorisation (sur la vidéo, le bourdon dispose encore de son ancienne motorisation, changée depuis).
-Munir les cloches 1, 3, 4, 5 et 7 de nouveaux marteaux de tintement de type « frappe lâchée »
A noter que les cloches de 1931 gardent leurs jougs en acier qui ont été restaurés. Le beffroi sur trois niveaux n’est en effet pas conçu pour les surmonter de moutons en chêne.

On peut saluer ici le savoir-faire d’une petite entreprise de la région hautement spécialisée dans l’installation, la maintenance et la mise en valeur historique du patrimoine campanaire.

Je remercie chaleureusement :
-M. Benoît Chobaz, président de la paroisse Notre-Dame de l’Assomption.
-M. l’abbé Martial Python, doyen de l’Unité Pastorale Bienheureuse Marguerite Bays
-M. Matthias Walter, expert-campanologue
-M. François Guex, collaborateur scientifique aux biens culturels de l’Etat de Fribourg
-La maison MECATAL, ses campanistes et tout spécialement son directeur, M. Jean-Paul Schorderet.
-Mes amis campanophiles Antoine Cordoba, carillonneur à Saint-Maurice et Taninges ; Allan Picelli, sacristain à Maîche ; Guilhem Lavignotte, organiste titulaire à Yverdon-les-Bains ; Philippe Simonnet, membre de la SFC ; John Brechbühl et Romeo dell’Era, membres de la GCCS ; Dominique Fatton, responsable technique des clochers de Val-de-Travers

Sources :
« La Collégiale de Romont », par Aloys Lauper, éditions Pro Fribourg 1996
« Le patrimoine campanaire fribourgeois », divers auteurs, éditions Pro Fribourg, 2012
https://www.romontregion.ch/fr/P5828/collegiale-notre-dame-de-l-assomption

A consulter :
http://www.romont.ch/
Mon article de 2013 avec l’ancien équipement

Cloches – Montbovon (CH-FR) église Saint-Grat

Une fonderie de la Marne s’invite en terres fribourgeoises

Une chapelle, puis deux églises… de chacun ces lieux de cultes successifs, Montbovon a conservé à chaque fois au moins une cloche. Présentation de cet intéressant ensemble constitué entre le XVIe et le XIXe qui résonne dans clocher de ce bel édifice néoroman.

C’est à Adolphe Fraisse (1835-1900) qu’on doit l’actuelle église Saint-Grat de Montbovon. Le brillant architecte naquit à Ferney-Voltaire, étudia à Fribourg puis fit de fréquents séjours à l’étranger avant de revenir en en terres fribourgeoises où il fut adjoint à la direction cantonale des bâtiments et conseiller communal. Sa réalisation la plus importante est bien sûr l’église de Châtel-Saint-Denis, sorte de mini-cathédrale néogothique édifiée dès 1872. A Montbovon, Fraisse opta pour le néoroman, comme il l’avait déjà fait 20 ans plus tôt pour la proche paroisse d’Albeuve. Consacrée le 24 mai 1898, l’église Saint-Grat succède à une chapelle achevée en 1515, dont il reste la cloche (petite cloche de l’Agonie), puis à une première église consacrée vers 1625. De cet édifice richement orné nous est parvenu une partie du mobilier, réparti aujourd’hui entre le Musée Gruérien, le Musée d’Art et d’Histoire de Fribourg, l’Université ainsi que des collections privées. La deuxième plus grande cloche de la sonnerie actuelle a elle aussi été coulée pour le clocher précédent. L’église Saint-Grat est remarquable par ses proportions équilibrées, son mobilier d’époque soigné et ses peintures polychromes un temps recouvertes, mais heureusement remises au jour à la toute fin du XXe siècle.

Le sonnerie de l’ancienne église semble avoir été composée de trois voix : les actuelles cloches 2 et 5, de même qu’une cloche reprise au prix du bronze par les frères Paintandre chargés en 1897 de compléter l’ensemble. Il s’agit de la seule sonnerie complète livrée pour le canton de Fribourg par la fonderie de la Marne, représentée en Suisse par le vaudois Auguste Thybaud, le fameux « accordeur de cloches ». On se rendit compte dans les années 1990 que le clocher avait subi les affres du temps. On lui refit alors une nouvelle flèche. On se rendit compte également que la maçonnerie s’était lézardée de l’ébranlement de la sonnerie. On ceintura donc la tour à l’extérieur et on installa deux rails d’acier à l’intérieur sous la chambre des cloches. Lors de la dépose des cloches, on s’aperçut que le beffroi de bois était vermoulu. La maison Ecoffey de Broc le remplaça par l’actuelle charpente en acier. La même entreprise se chargea également de modifier l’horloge mécanique (Odobey, 1897) pour remontage automatique des poids et pilotage par horloge-mère radio-pilotée.

-Cloche 1, note ré3, diamètre 139cm, poids 1’624kg, coulée en 1897 par les frères Paintandre à Vitry-le-François. Inscription : DE L’ETERNEL AU LOIN CHANTEZ LA GLOIRE,
-Cloche 2, note fa#3, diamètre 108cm, poids environ 750kg, coulée en 1795 par Pierre Dreffet de Vevey. Inscription : RECOIS SEIGNEUR LA CLOCHE QUI SERVIRA D’APPEL POUR CELEBRER TA GLOIRE
-Cloche 3, note la3, diamètre 93cm, poids 420kg, coulée en 1897 par les frères Paintandre à Vitry-le-François. Inscription : A LOUER LE SEIGNEUR QUAND MA VOIX VOUS APPELLE AVEC UN SAINT TRANSPORT, VENEZ PEUPLE FIDELE.
-Cloche 4, cloche de l’école, note ré4, diamètre 69cm, poids 203kg, coulée en 1897 par les frères Paintandre à Vitry-le-François. Inscription : AUX LECONS DES VERTUS, J’INVITE LA JEUNESSE. ENFANTS, MA VOIX EST DOUCEUR ET CHANTE L’ALLEGRESSE.
-Cloche 5, cloche de l’Agonie, note mi4, diamètre 60cm, poids environ 200kg, coulée en 1596 par Pierre Guillet de Romont. Inscription : IN CYMBALIS BENESONANTIBUS, LAUDATE DOMINUM (louez le seigneur sur les cymbales retentissantes)

Mes plus vifs remerciements à la paroisse de Montbovon et à son président, M. Pierre Robadey. Merci à mes camarades campanaires pour leur indispensable collaboration et les échanges amicaux : John Brechbühl, membre de la GCCS ; Dominique Fatton, responsable technique des clochers de Val-de-Travers : Guilhem Lavignotte, organiste titulaire à Yverdon-les-Bains ; Stefan Mittl, expert-campanologue à Zurich. Remerciements enfin à M. Jean-Paul Schorderet, campaniste, directeur de l’entreprise Mécatal.

Sources :
« 2 églises, 4 chapelles, 5 siècles » ouvrage réédité en 1998, imprimerie Perroud, Bulle
« Le patrimoine campanaire fribourgeois », éditions Pro Fribourg, 2012
http://www.hls-dhs-dss.ch/textes/f/F19448.php

A consulter
http://www.haut-intyamon.ch/la-commune/montbovon.html
http://www.la-gruyere.ch/fr/Z3283/vallee-de-l-intyamon

Cloches – Lessoc (CH-FR) église Saint-Martin

Sonnerie insolite et historique à six voix avec une cloche du XIVe siècle

La sonnerie de l’église Saint-Martin de Lessoc est composée de six cloches, toutes historiques, dont deux se manient encore à la corde. « Martenetta », la doyenne, fait partie du cercle restreint des cloches antérieures au XVe siècle.

Un parfum authenticité – Je vous emmène aujourd’hui dans la vallée de l’Intyamon, une des régions les plus pittoresques du canton de Fribourg. C’est un parfum d’authenticité qui flotte dans l’air ici : rares sont en effet les industries et les résidences secondaires à s’être implantées dans ce coin de pays. On ne s’en plaindra pas ! Si les églises voisines d’Albeuve et de Neirivue ont dû être reconstruites suite aux terribles incendies de 1876 et de 1904, si les habitants de Grandvillard ont choisi de reconstruire leur ancien sanctuaire du début du XVIIe siècle en 1936, les autres villages de la vallée ont pu (et ont voulu) préserver leurs églises et chapelles ancestrales. L’église Saint-Martin de Lessoc fut consacrée en 1635, quelques années après l’érection de la paroisse. Comme beaucoup de ses contemporains, l’édifice a subi des transformations plus ou moins heureuses au fil des ans. Le plafond de bois s’est vu recouvert de plâtre, les murs ont été crépis, les retables de bois ont été remplacés par du marbre, les vitraux originaux avec leurs carreaux minuscules ont cédé leur place à des œuvres du XIXe siècle. La restauration menée à la fin du XXe siècle a rendu à cette charmante église une bonne partie de son caractère historique.

Une cloche du XIVe siècle – Inconditionnels du diapason, je vous invite à passer votre chemin ! Nous nous trouvons ici en présence d’une sonnerie hétérogène dont la doyenne pourrait bien être une des cloches les plus anciennes du canton de Fribourg ! « Martenetta » semble en effet dater de la seconde moitié du XIVe siècle. Elle devait être jadis accrochée de le clocher d’une chapelle détruite en 1627. Cette petite cloche est actionnée aujourd’hui encore à la corde pour chasser la grêle. Datée de 1746, non signée, la cloche de l’Agonie annonce – manuellement elle aussi – les décès dans la paroisse. Les quatre plus grandes cloches sont motorisées depuis 1959. Leurs jougs de chêne ont pour l’occasion été remplacés par des montures en acier de type « Bochud », très courant dans la région. Les cloches no1 et 3 sont les seules à être signées. Elles portent toutes deux la signature « Treboux fils » (Samuel, ndlr) et la date de 1837. Les cloches no2 et 4 datent de 1640 et ne donnent aucune indication quant à leur fondeur. Désaffecté lors de la motorisation de 1959, le mécanisme du carillon a été remis à neuf en 2008 et inauguré le 15 novembre pour la fête patronale. Félicitations à M. Célestin Fragnière pour cette heureuse initiative ! Signalons encore que l’unique cadran et les tintements sont actionnés par une horloge mécanique Baer de 1959 avec remontage automatique des poids. L’heure est frappée sur la grande cloche avec rappel après 2 minutes et demie. La demi-heure se tinte sur la cloche no4.

-Cloche 1, note mi3 -13/100, diamètre 124cm, poids environ 1200kg, coulée en 1837 par Samuel Treboux de Vevey. DAIGNEZ SEIGNEUR AGREER DES FIDELES DE CETTE PAROISSE LA CLOCHE QUI SERVIRA D’APPEL POUR CELEBRER VOTRE GLOIRE.
-Cloche 2, note sol#3 -2/100, diamètre 96cm, poids environ 600kg, coulée en 1640. IHS MAR AD DIVINAS POPVLVM CONGREGO DEFVNCTOS PLORO TEMPESTATES FVGO TERROR SVM DOEMONIORUM. Traduction : Jésus, Marie. Je rassemble le peuple pour les louanges divines, je pleure les défunts, je fais fuir les tempêtes, je suis la terreur des démons.
-Cloche 3, note la3 +26/100, diamètre 89cm, poids environ 420kg, coulée en 1837 par Samuel Treboux de Vevey.  A LA GLOIRE DE DIEU ET A L’HONNEUR DE LA B.V.M ET DE ST MARTIN PATRON DE LA PAROISSE DE LESSOC.
-Cloche 4, dite « cloche de l’école », note do4 +26/100, diamètre 75cm, poids environ 260kg, coulée en 1640. IHS MRA NVMINIS AD LAVDEM SEMPER PVLSATA SONABO. Traduction : Jésus, Marie. Je sonnerai pour la louange de Dieu à chaque fois que je serai frappée.
-Cloche 5, dite « Martenetta », note si4 +25/100, diamètre 46cm, poids environ 50kg, coulée vraisemblablement durant la seconde moitié du XIVe siècle. SANCTA VIRGO MARIA R ORATE PRO NOBIS AMEN. Traduction : Sainte Vierge Marie priez pour nous Amen.
-Cloche 6, cloche de l’Agonie, note ré5 +11/100, diamètre 35cm, poids environ 25kg, coulée en 1746. CLAMANTIS PRO DEO VOX. Traduction : Voix de celui qui appelle au nom de Dieu.

Analyse musicale

Octave inf Prime Tierce min Quinte Octave sup
mi3 mi2 +1/100 mi3+16/100 sol3 -7/100 si3 +51/100 mi4 -13/100
sol#3 sol#2 -45/100 sol#3 +43/100 si3 -1/100 ré#4 -49/100 sol#4 -2/100
la3 la2 -53/100 la3 +160/100 do4 +42/100 mi4 +13/100 la4 +26/100
do4 do3 +87/100 do4 +45/100 ré#4 +66/100 sol4 +85/100 do5 +26/100
si4 si3 -184/100 si4 -88/100 ré5 -423/100 fa#4 -168/100 si5 +25/100
ré5 ré4 +97/100 ré5 -280/100 fa5 -23/100 la5 -58/100 ré6 +11/100

(diapason : la3 = 435Hz, déviation en 1/100 de 1/2 ton)

Mes plus vifs remerciements à la paroisse de Lessoc, et tout spécialement à M. Célestin Fragnière pour sa gentillesse et sa disponibilité. Merci également à mes camarades Dominique, John et Stefan pour leur aide précieuse.

Sources :
« L’église Saint-Martin de Lessoc de 1627 à nos jours », par Célestin Fragnière, juillet 2009.
« Le patrimoine campanaire fribourgeois », éditions Pro Fribourg, 2012

A consulter :
http://www.haut-intyamon.ch/accueil.html

Cloches – Mézières (CH-FR) église Saint-Pierre-aux-Liens

Nouvel équipement pour la sonnerie de Mézières (6 cloches en ré#3 par Paccard, Treboux et fondeur gothique)

-Cloche 1, note ré#3, poids 1’287 kg, coulée en 1937 par les fils de G. Paccard à Annecy-le-Vieux
-Cloche 2, note fa#3, coulée en 1853 par Samuel Treboux à Corsier-sur-Vevey
-Cloche 3, note sol#3, coulée en 1937 par les fils de G. Paccard à Annecy-le-Vieux
-Cloche 4, note la#3, poids 520kg, coulée en 1939 par les fils de G. Paccard à Annecy-le-Vieux
-Cloche 5, note do#4, coulée en 1853 par Samuel Treboux à Corsier-sur-Vevey
[Cloche 6, cloche de l’Agonie, note fa#4, coulée en 1517 (?) gothique]

Sur la vidéo de présentation, le plénum des cinq plus grandes cloches, suivi du tintement (40 coups) et de la volée de la cloche de l’Agonie

Une église construite en des temps difficiles – Consacrée le 1er août 1939, l’église Saint-Pierre-aux-Liens de Mézières est l’une des réalisations les plus emblématique de Fernand Dumas. Quatre ans plus tôt, l’architecte romontois avait été approché pour de simples travaux d’agrandissement, du type de ceux menés à Sâles et à Léchelles. En pleine période de crise économique, on envisageait en effet mal de se lancer dans le chantier pharaonique inhérent à toute nouvelle église. Mais suite à l’octroi de généreux subsides de l’Etat, il fut décidé de remplacer l’ancienne église, pourtant reconstruite presque entièrement en 1817 (seul le choeur de style gothique tardif avait été conservé). Fernand Dumas fit une nouvelle fois appel pour la décoration au collectif Saint-Luc, ce groupe d’artistes fondé en 1919 par Alexandre Cingria, François Beaud, Marcel Feuillat et Marcel Poncet.

De la récup’ et de nouvelles cloches – L’ancienne église ayant été dotée d’une nouvelle sonnerie par Samuel Treboux en 1853, il fut décidé de récupérer ces trois cloches et de créer un motif pentatonique mineur, très en vogue à l’époque, avec l’ajout de deux nouvelles cloches Paccard façonnées en 1937. Vraisemblablement endommagée lors de son déménagement, une des cloches du XIXe siècle dut être remplacée en 1939. Elle conserve toutefois le joug en bois de son aînée. Egalement accrochée dans le massif clocher habillé de pierres de taille, une petite cloche gothique, coulée en 1517, utilisée aujourd’hui comme cloche de l’Agonie (annonce des défunts de la paroisse), et ne donnant de la voix qu’en solo au tintement et à la volée. La sonnerie, déjà présentée sur ces pages en 2010, est dotée depuis peu d’un nouvel équipement. La maison Mécatal proposa dans un premier temps de remplacer le beffroi en acier, rouillé, par une structure en bois protégée des intempéries par des abat-son. Cette suggestion fut toutefois rejetée, car portant atteinte au style ajouré du clocher voulu par l’architecte de ce monument historique

 

Mes plus vifs remerciements à la maison Mécatal, Jean-Paul Schorderet et son équipe.

Sources
Publication du Service des Biens Culturels du canton de Fribourg, placardé dans l’église.

A consulter
http://upglane.ch/?paroisse=Berlens-Mezieres&page=eglise
http://www.mezieres-fr.ch/

Cloches – Remaufens (CH-FR) église St Maurice

Sonnerie partiellement historique de 5 cloches en ré#3

P1050394

C’est par une belle journée automnale que mes camarades campanaires et moi sommes partis  vadrouiller dans le beau district fribourgeois de la Veveyse, moins souvent cité des touristes que la verte Gruyère, mais tout aussi pittoresque et tout autant riche d’histoire. Saviez-vous par exemple que Remaufens, de même que Châtel-St-Denis et Semsales, dépendaient au Moyen-Age de la seigneurie de Fruence, aujourd’hui disparue ? De cette imposante place forte ne restent aujourd’hui que de modestes vestiges, alors que la famille est elle-même éteinte depuis le XVe siècle. Erigée en paroisse depuis 1835, Remaufens luttait depuis des années pour obtenir son indépendance. Le projet d’Attalens de bâtir une nouvelle église, à laquelle sa voisine aurait dû évidemment participer financièrement, dopa encore davantage ce projet d’autonomie, finalement mené à bien après avoir été dûment motivé par des arguments tels que « l’éloignement de l’église paroissiale », que « les enfants nouveau-nés restaient souvent pendant plusieurs jours sans recevoir le baptême, à cause du mauvais état des chemins » (source: Dictionnaire historique et statistique des paroisses catholiques du canton de Fribourg). Une fois la paroisse érigée, c’est très rapidement que furent entrepris les travaux de construction de l’actuelle église paroissiale, qui vint remplacer la chapelle construite en 1416 et transformée à la fin du XVIe siècle. Dédiée elle aussi à St Maurice, cette belle et spacieuse église au clocher coiffé d’un élégant bulbe fut consacrée le 24 septembre 1843.

De la modeste chapelle citée plus haut – et c’est ici que le passionné de cloches historiques que je suis se réjouit une nouvelle fois d’habiter le canton de Fribourg et non la Suisse allemande (!) – ont été conservées les anciennes cloches. Accrochée tout là-haut dans son lanternon, avec pour dure mais néanmoins noble mission d’annoncer les décès dans la paroisse (cloche de l’Agonie), la plus petite et la plus ancienne de ces vénérables dames de bronze, de style gothique tardif, porte les inscriptions latines « s maurici ora pro nobis et s theoduli ano d[o]m[ini] mcccccvi », autrement dit « saint maurice prie pour nous et saint théodule, [fondue] l’année du seigneur 1506 ». Plus bas, dans la chambre des cloches principale se trouve une remarquable cloche baroque de 1768 signée Jean-Antoine et Alexis Damez de Morteau, bourgeois d’Estavayer-le-Lac. La construction de l’église paroissiale donna lieu à la fonte de trois autres cloches dans les ateliers de Samuel Treboux : les actuelles cloches no 2 et 3, toujours existantes, et la plus grande cloche, fêlée en 1854 et 1878, qui dut être refaite par Gustave Treboux, le neveu de Samuel. Les trois plus grandes cloches possèdent encore leurs jougs et ferrures d’origine, alors que les deux plus petites sont accrochées à des axes en acier.

-Cloche 1, note ré# 3 -17/100, coulée en 1879 par Gustave Treboux à Vevey
-Cloche 2, note fa# 3 +6/100, coulée en 1843 par Samuel Treboux à Corsier-s/Vevey
-Cloche 3, note la 3 + 16/100, coulée en 1843 par Samuel Treboux à Corsier-s/Vevey
-Cloche 4, note do# 4 -10/100, coulée en 1768 par Jean-Antoine et Alexis Damez de Morteau
-Cloche 5, note sol# 4 -23/100, coulée en 1506.
(la3 = 435Hz)

Octave inf Prime Tierce min Quinte Octave sup
Cl1 ré#3 -8.98 -26.04 -13.26 4.25 -17.49
Cl2 fa#3 -18.03 -3.74 3.98 6.10 5.72
Cl3 la3 19.79 -11.98 15.64 24.36 15.85
Cl4 do#4 115.86 118.81 26.98 299.04 -9.71
Cl5 sol#4 67.86 -288.80 -17.00 -28.90 22.68

Mes plus vifs remerciements à M. Michel Genoud, président de paroisse, pour son aimable autorisation, ainsi qu’à M. Jean-Marie Michel, vice-président, pour son chaleureux accueil. Amitiés à mes valeureux camarades campanaires qui se sont rendus utiles de mille et une manières pour rendre ce reportage possible : Antoine, carillonneur à St Maurice et à Taninges ; Dominique, responsable technique de clochers de Val-de-Travers ; Guilhem Lavignotte, organiste titulaire d’Yverdon-les-Bains ; John Brechbühl, membre de la GCCS ; Stefan Mittl, expert-campanologue à Zurich.

Sources :
-Dictionnaire historique et statistique des paroisses catholiques du canton de Fribourg, volume 10, par le Père Apollinaire Deillon, éditions St Paul, 1899
-Rapport rédigé par M. Aloys Lauper, chef de service adjoint au Service des Biens Culturels de l’Etat de Fribourg
https://fr.wikipedia.org/wiki/Famille_de_Fruence

A consulter :
http://www.upstdenis.ch/
http://www.remaufens.ch/

Cloches – Vuadens (CH-FR) église St Sylvestre

Imposante sonnerie de 6 cloches sur les terres du Vieux Chalet cher à l’abbé Bovet

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J’avoue – non sans quelque honte – avoir traversé Vuadens des centaines de fois sans jamais avoir eu l’idée de m’y arrêter. Ce qui flotte avant tout dans l’air ici, c’est la splendeur industrielle passée, toujours visible au travers des imposants locaux de la maison Guigoz fondée en 1908, et qui a nourri des générations de bébés de toute la planète avec son célèbre lait en poudre conçu et conditionné ici-même jusque dans les années 1980. Mais en se penchant sur la riche histoire du lieu, on apprend que le lait… oui, ce fameux lait de Vuadens, était réputé au XIXe siècle déjà, d’une tout autre manière. Des visiteurs de marque comme Chateaubriand, Victor Hugo ou encore Lamartine appréciaient les vertus des bains de petit-lait aux Colombettes, cet imposant chalet – jadis établissement thermal – monument emblématique de la Gruyère, passé à la postérité pour avoir inspiré l’abbé Bovet dans son fameux « Ranz des Vaches ». Les armoiries de Vuadens rappellent les trois périodes de l’histoire du village : La petite croix tréflée évoque l’abbaye de Saint-Maurice à laquelle les terres furent données en 517 par Sigismond, roi de Bourgogne. En 1317, cette possession fut cédée à Louis de Savoie, baron de Vaud, ce que rappelle la croix savoyarde. Enfin, la grue comtale signifie que Vuadens fut inféodé au comte de Gruyère vers 1450. Sur le plan religieux, Vuadens devint paroisse en 1602 après affranchissement de Bulle. La première église paroissiale fut consacrée en 1615. Reconstruite en 1789, elle fut la proie des flammes en 1866. L’église actuelle arbore la date de 1867 sur son clocher. Une importante restauration semble avoir été menée en 1962 : cette année-là furent installés les vitraux du célèbre maître-verrier Yoki ainsi que deux nouvelles cloches.

Ce qui m’a poussé à venir immortaliser la sonnerie de Vuadens, à dire vrai, c’est la découverte – après consultation des archives de la fonderie d’Aarau – de trois cloches de 1868 coulées par Emanuel Ruetschi. La deuxième génération de cette famille de fondeurs argoviens a réalisé, il faut le savoir, de fort belles pièces. Cerise sur le gâteau, la parution en 2012 du remarquable ouvrage « Le patrimoine campanaire fribourgeois » (éditions Pro Fribourg) et la mention d’une intéressante petite cloche coulée en 1661 par Theodosius et Peter Ernst, une famille de saintiers originaires de Lindau, en Allemagne. Cette cloche ne donne habituellement de la voix que pour l’annonce des décès (cloche de l’Agonie, en solo) et avant les cérémonies funèbres (glas avec les six cloches). Le dictionnaire historique et statistique des paroisses catholiques du canton de Fribourg mentionne que le 4 juin 1766, « une grande cloche du poids de 35 quintaux et 35 livres » fut bénie à Bulle, en même temps qu’une cloche pour Riaz, deux pour Albeuve et quatre pour le chef-lieu gruérien. Cette bénédiction ne semble pas avoir porté chance à ces dames de bronze : à part celle de Riaz, qui nous est parvenue, les autres cloches ont toutes été anéanties dans les incendies de leurs clochers respectifs. La cloche de Riaz portant la signature d’Antoine Livremont, on peut raisonnablement penser que c’est également le fondeur de Pontarlier, établi un temps en terres fribourgeoises, qui a signé les autres cloches bénies ce jour-là.

-Cloche 1, dédiée à St Sylvestre, note réb3 +22/100, coulée en 1867 par Emanuel Ruetschi à Aarau
-Cloche 2, note fa3 -21/100, coulée en 1867 par Emanuel Ruetschi à Aarau
-Cloche 3, note lab3 +8/100, coulée en 1867 par Emanuel Ruetschi à Aarau
-Cloche 4, note sib3 -5/100, coulée en 1962 par Ruetschi (société anonyme) à Aarau
-Cloche 5, note do4 +21/100, coulée en 1962 par Ruetschi (société anonyme) à Aarau
-Cloche 6, note fa4 -25/100, coulée en 1661 par Theodosius et Peter Ernst, de Lindau (D)

(la3 = 435Hz)

Octave inf Prime Tierce min Quinte Octave sup
Cl1 réb3 -25.67 -12.89 37.41 -23.71 21.77
Cl2 fa3 -67.80 -67.80 -15.18 -86.83 -21.49
Cl3 lab3 -45.22 -45.22 6.12 -49.04 8.05
Cl4 sib3 -72.36 -14.59 12.38 -102.03 -5.14
Cl5 do4 -45.11 -31.42 30.18 -108.49 20.61
Cl6 fa4 -83.51 -34.23 -17.31 -124.18 -25.30

Les cloches de l’église

La cloche de l’école (Gustave Treboux, Vevey, 1886), désaffectée

Mes remerciements les plus sincères à M. François Déforel, président de paroisse, qui nous a consacré un peu de son temps en cette belle journée de samedi 14 novembre, et qui nous a autorisé à procéder à des sonneries spéciales pour nos enregistrements. Un grand merci également à mes excellents camarades campanaires présents ce jour-là, avec qui il est toujours savoureux d’échanger, et qui se sont rendus utiles de mille et une manières : Antoine « Les Cloches Savoyardes », carillonneur à Taninges et à St Maurice ; Dominique « Valdom68 », responsable technique des clochers de Val-de-Travers ; Guilhem Lavignotte, organiste titulaire à Yverdon-les-Bains ; John Brechbühl, membre de la GCCS ; Stefan Mittl, expert-campanologue à Zurich.

Sources :
Le patrimoine campanaire fribourgeois, éditions Pro Fribourg, 2012
Dictionnaire historique et statistique des paroisses catholiques du canton de Fribourg, volume 12
http://www.vuadens.ch
http://www.nestle.fr/nosmarques/nutritioninfantile/laboratoiresguigoz

A consulter :
http://www.upcompassion.ch/index.php/site-map-3/cpvuadens
http://www.cath-fr.ch/
http://www.fr.ch/

Cloches – Fribourg (CH-FR) basilique Notre-Dame

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La basilique Notre-Dame est le plus ancien édifice religieux toujours existant à Fribourg. Avant 1157, date de la fondation de la ville par les Zaehringen, était mentionnée au même emplacement une chapelle desservie par le monastère de Payerne. Une église de style roman semble avoir succédé à cette première chapelle dès 1201. D’importantes transformations sont menées de 1467 à 1525 : pose de la flèche sur le clocher, construction du chevet pentagonal en remplacement d’une abside semi-circulaire, rehaussement du toit du chœur, transformation des baies romanes des collatéraux en fenêtres gothiques, et enfin construction de la chapelle Saint-André, détruite en 1785. Cette fin de XVIIIe siècle est également marquée par une restauration complète de l’édifice : reconstruction et rehaussement du haut du vaisseau central, construction d’une façade de style classique, reconstruction de la partie supérieure du clocher, qui reçoit une nouvelle flèche, et revêtement de l’intérieur de l’église en staff dans le style Louis XVI. Dénommée collégiale en 1728 après que les membres du clergé de Notre-Dame eussent pris le titre de chanoine, l’édifice est élevée au rang de basilique mineure par le pape Pie XI en 1932. Depuis 2012, la charge pastorale de la Basilique – fraîchement rénovée – est confiée à la Fraternité sacerdotale Saint-Pierre.

Les 4 cloches de la basilique forment un ensemble peu commun, de par leur âge et la curieuse disposition des notes égrenées. Il est important de savoir qu’avant la motorisation de la sonnerie en 1931, les 2 plus petites cloches, propriétés de la Confrérie du Rosaire, ne mêlaient jamais leur voix aux 2 plus grandes. C’est également en 1931 que sont accrochés les battants actuels. Les cloches no1 et 3 sont les seules à mentionner leur date de coulée. La cloche no3 – la plus récente de l’ensemble – est la seule à arborer la signature de son fondeur. Elle est aussi la seule à disposer encore de son joug et de ses ferrures d’origine. Matthias Walter, expert campanologue à Berne, attribue les cloches no1 et 4 à Hensli Follare de Fribourg. L’actuel beffroi date de 1842. En 1909, la cloche no4, voit ses anses – vraisemblablement en mauvais état – remplacées par l’actuel plateau de fixation.

-Cloche 1, note fa#3 -23/100, diamètre 125.5cm, coulée en 1456, attribuée à Hensli Follare de Fribourg
-Cloche 2, note si3 +1/100, diamètre 93cm, gothique (XIVe siècle)
-Cloche 3, note la#4 +46/100, diamètre 43.5cm,  coulée en 1706 par Hans Wilhelm Klely de Fribourg
-Cloche 4, note do5 +8/100, diamètre 41 cm, gothique tardif (XVe siècle), attribuée à Hensli Follare de Fribourg

La3 = 435hz, déviation en 1/100 de 1/2 ton

Octave inf. Prime Tierce min. Quinte Octave sup.
Cloche 1 fa#2 +111 fa#3 -309 la3 -44. do#4 +28 fa#4 -23
Cloche 2 si2 +122 si3 -244 ré 4 +1 fa#4 +93 si4 +1
Cloche 3 la#3 +106 la#4 +206 do#5 +103 fa5 +108 la#5 +46
Cloche 4 do4 +90 do5 -80 ré#5 +34 sol5 +30 do6 +8

La grande cloche

La cloche 2

La cloche 3

La petite cloche

Mes plus vifs remerciements au Père Arnaud Evrat, recteur, pour son aimable autorisation et son chaleureux accueil lors de ma visite de reconnaissance le 20 mars 2015. Remercié soit également le Père Arnaud Moura, qui nous a accueillis tout aussi aimablement le 16 avril 2015 lors du tournage vidéo. Amitiés enfin à mes excellents camarades campanaires : Antoine, carillonneur à Taninges; Matthias Walter, expert-campanologue à Berne; Pascal Krafft, expert-campanologue en Alsace.

Sources
Recensement du patrimoine religieux du canton de Fribourg (fiches no 314 à 317)
« Le patrimoine campanaire fribourgeois », éditions Pro Fribourg, 2012
http://basilique-fribourg.ch/

Cloches – Fribourg (CH-FR) cathédrale St Nicolas

cathédrale depuis la sarineLa première église St Nicolas de Fribourg fut consacrée le 6 juin 1182. Elle resta pendant près de 400 ans le seul sanctuaire paroissial de la ville, en marge de l’établissement de plusieurs ordres religieux dans les environs. Le chapitre collégial de St Nicolas fut constitué en 1512. L’indépendance vis-à-vis de l’évêque de Lausanne se vit encore renforcé par la Réforme en 1536. L’évêque finit par recevoir l’autorisation de résider à Fribourg en 1601, mais dut renoncer à toute prétention temporelle, le chapitre collégial assurant cette prérogative. Changement de donne en 1798 avec la proclamation de la République helvétique. Ce n’est qu’en 1924 que la collégiale devint cathédrale du diocèse nouvellement créé de Lausanne, Genève et Fribourg.

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L’actuel édifice semble avoir été bâti entre XIIIe et le XVe siècle. Le 1er clocher fut édifié à cheval sur le chœur vers 1300. En 1370, on entama la construction d’un imposant clocher-porche, achevé en 1490. Haut de 76 mètres, il ne fut jamais destiné à être couronné d’une flèche, contrairement à ce qu’affirme aujourd’hui encore la légende.

La sonnerie de la cathédrale St Nicolas de Fribourg compte parmi les riches d’Europe sur le plan historique. Pas moins de 13 cloches, coulées entre le XIV et le XVIIIe siècle, la composent. Leurs profils et leurs décorations dénotent différentes influences, allemande et française essentiellement. Elles nous montrent surtout, de manière vivante, l’évolution de l’art campanaire durant 400 ans. La plus célèbre de l’ensemble est sans nul doute la cloche de Ste Barbe, coulée en 1367 par Walter Reber d’Aarau. Elle est la plus ancienne cloche encore existante issue de l’industrie campanaire argovienne, perpétuée jusqu’à nos jours par la maison Ruetschi. Remarquables sont aussi les 2 bourdons, coulés en 1505 par Pierre de Montureux et Robert de Besançon. La petite cloche de Plasselb, datée de la même année, est un autre témoignage du remarquable savoir-faire de ces 2 saintiers bisontins. Equipée de jougs en acier lors de leur motorisation dans les années 1950, les cloches de la cathédrale St Nicolas ont retrouvé il y a peu un équipement digne de leur rang. Les cloches de la flèche, muettes depuis 60 ans, redonnent également depuis peu de la voix.

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Vue sur les cloches 3, 4 et 5

Dans le clocher
-Cloche 1, dédiée à la Vierge, note sol2 -5/16, diamètre 220 cm, poids environ 7’000kg, coulée en 1505 par Pierre de Montureux et Robert de Besançon.
-Cloche 2, dédiée à Ste Catherine, note si2 -2/16, diamètre 174cm, poids environ 3’550kg, coulée en 1505 par Pierre de Montureux et Robert de Besançon.
-Cloche 3, dédiée à Ste Barbe, note mib3 +1/16, diamètre 146cm, poids environ 2’080kg, coulée en 1367 par Walter Reber d’Aarau
-Cloche 4, « Cloche des Heures », note fa3 -1/16, diamètre 130cm, poids environ 1’600kg, coulée en 1416 par Antoine Grangier de Fribourg
-Cloche 5, « Cloche de Prime », note lab3 +7/16, diamètre 110cm, poids environ 980kg, coulée en 1437 par Pierre Follare de Fribourg
-Cloche 6, « Cloche de Gambach », note sib3 +8/16, diamètre 95cm, poids environ 600kg, coulée en 1562 par Hans Burdi de Fribourg
-Cloche 7, « Premère Cloche du Sacristain », note mib4 +5/16, diamètre 68cm, poids environ 210kg, coulée en 1569 par Jakob Kegler de Fribourg
-Cloche 8, « Deuxième Cloche du Sacristain », note solb4 -1/16, diamètre 65cm, poids environ 230kg, coulée au XIVe siècle (sans doute la plus ancienne de la sonnerie)
-Cloche 9, « Cloche de l’Agonie », note solb4 +-0/16, diamètre 56cm, poids environ 110kg, coulée en 1734 par Jakob Klely de Fribourg

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Cloches des Choralistes

Désaffectées
-Première Cloche des Choralistes, note environ sol5, diamètre 29.1cm, poids environ 20kg, coulée en 1567 par Jakob Kegler de Fribourg
-Deuxième Cloche des Choralistes, note environ sol5, diamètre 28.9cm, poids environ 18kg, coulée en 1554 par Jakob Burdi de Fribourg

Fribourg cathédrale cloches flèche

Les cloches de la flèche

Dans la flèche (bonus à la fin de la vidéo)
-Cloche 10, « Cloche de Messe », note si4 +3/16, diamètre 41.5cm, poids environ 50kg, coulée en 1737 par Joseph Klely de Fribourg
-Cloche 11, « Cloche du St Sacrement, note fa5 +8/16, diamètre 31.6cm, poids environ 23kg, coulée en 1656 par François-Barthélémy Reyff de Fribourg.

« de 2 »

Mes plus vifs remerciements à Mme Valentine Murith, Présidente du Conseil de paroisse; M. Pierre Féraut, sacristain titulaire; M. Daniel Macherel, sacristain remplaçant. Merci également à mes excellents camarades campanaires qui ont rendu ce reportage possible : Antoine, carillonneur à Taninges; Matthias Walter, expert-campanologue à Berne; Guilhem Lavignotte, organiste à Yverdon-les-Bains; Pascal Krafft, expert-campanologue en Alsace.

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A consulter
« Les cloches de la cathédrale St Nicolas de Fribourg », de Matthias Walter, traduit de l’allemand par Pascal Krafft, éditions de la cathédrale de Fribourg, 2008
« Le patrimoine campanaire fribourgeois », éditions Pro Fribourg, 2012
http://www.stnicolas.ch/
http://fr.wikipedia.org/wiki/Cath%C3%A9drale_Saint-Nicolas_de_Fribourg

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Cloches – Fribourg (CH-FR) église et collège St Michel

Fribourg St Michel église

http://www.csmfr.ch/

Ancien établissement jésuite, le collège St Michel de Fribourg fut fondé en 1582, sous l’impulsion du pape Grégoire XIII, mais aussi et surtout de St Pierre Canisius, dans le but d’offrir un enseignement catholique de qualité, et enrayer par là même la fuite des futures élites vers les cantons réformés. Ce n’est qu’en 1660 que les premiers bâtiments furent achevés sur le site actuel. L’église, à l’origine  de style gothique tardif, fut édifiée de 1606 à 1613. Sa transformation dans le style rococo remonte au XVIIIe siècle. De cette époque datent les magnifiques fresques représentant la lutte entre le Bien et le Mal. L’Ordre des jésuites est supprimé en 1773, les prêtres diocésains leur succèdent à la tête de l’établissement. Face à l’augmentation du nombre d’élèves est décidée la construction du lycée de 1829 à 1838. Surnommé « Aquarium » en raison de son architecture contemporaine vitrée, un nouveau bâtiment voit le jour dans les années 1960. En 1972, c’est autour du complexe sportif, situé en contrebas, d’être inauguré. Actuellement, le Collège St-Michel est un établissement cantonal laïc et mixte, assurant l’accès à tous les types de maturités reconnus par la Confédération. De nombreuses personnalités y ont étudié, comme l’ancien président de la Confédération Joseph Deiss, l’évêque Pierre Mamie (1920-2008) , l’écrivain Jacques Chessex (1934-2009), ou encore l’actuel président de l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne Patrick Aebischer. L’actuelle vocation de l’église St Michel est essentiellement celle d’une salle de concert. Trône sur sa tribune occidentale un magnifique orgue né de la fusion de 2 instruments historiques: celui de St Michel (orgue Bihler) et celui de l’abbaye d’Hauterive (orgue Mooser).

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L’élégant clocher à bulbe renferme une sonnerie historique de grande valeur. Les 2 plus grandes cloches furent coulées en 1646 par Urs Scherer, Gabriel Murer et Martin Keiser. Ces fondeurs soleurois réalisèrent la même année la grande cloche en ré du temple Pestalozzi d’Yverdon-les-Bains. Les 2 plus petites cloches de St Michel sont l’oeuvre de fondeurs fribourgeois : Jakob Klely pour la plus petite en 1716, et Jakob Kegler pour la cloche no3 (1578). Cette dernière cloche semble ne pas avoir été coulée pour ce clocher. Elle y aurait été ajoutée ultérieurement.

Kegler

Signature de Jakob Kegler l’ancien sur la cloche no4 de l’église St Pierre-et-Paul de Marly

Jakob Kegler, originaire de Romont, est admis bourgeois de la ville de Fribourg en 1561. Il choisit alors de germaniser son nom « Jacques Guillet » (orthographié parfois « Quillet ») en « Jakob Kegler ». J.K. est le cousin germain d’un autre fondeur, Pierre Guillet, établi à Payerne, et qui coula la grande cloche (toujours existante) de l’abbatiale de sa ville en 1603. L’orthographe « Kegler » évoluera par la suite en « Kugler » avec Claude et Jakob le jeune, eux aussi fondeurs. Fait rarissime dans nos contrées pour une sonnerie de ce gabarit, les 4 cloches de St Michel se sonnent aujourd’hui encore à la corde. Le plaisir de mes camarades et de moi-même s’en est ainsi trouvé décuplé lors de notre visite en cette belle journée d’avril 2015.


-Cloche no1, note mi3 -13/100, diamètre 1’234mm, coulée en 1646 par Urs Scherer, Gabriel Murer et Martin Keiser de Soleure
-Cloche no2, note sol3 -39/100, diamètre 1’043mm, coulée en 1646 par Urs Scherer, Gabriel Murer et Martin Keiser de Soleure
-Cloche no3, note si3 -42/100, diamètre 905mm, coulée en 1578 par Jacob Kegler de Fribourg
-Cloche no4, note do4 -30/100, diamètre 760mm, coulée en 1716 par Jacob Klely de Fribourg

Analyse (la3=435Hz, déviation en 1/100 de 1/2 ton)

Octave inf Prime Tierce min Quinte Octave sup
Cloche 1 mi2 -10/100 mi3 -103/100 sol3 -39/100 si3 +48/100 mi4 -13/100
Cloche 2 sol2 -71/100 sol3 -113/100 sib3 -65/100 ré 4+1/100 sol4 -39/100
Cloche 3 si2 -22/100 si3 -153/100 ré4 -50/100 solb4 -74/100 si4 -42/100
Cloche 4 do3 -18/100 do4 -94/100 mib4 +2/100 sol4 -147/100 do5 -30/100

Les 2 grandes cloches

La cloche no3

La petite cloche

L’église St Michel

Mes plus vifs remerciements à M. Axel Loup, administrateur du collège St Michel, pour son aimable autorisation, et à M. Roland Baechler, concierge, pour son chaleureux accueil et ses talents de sonneur. Merci également à mes excellents camarades campanaires Matthias Walter, expert-campanologue à Berne, et Antoine, carillonneur à Taninges, pour leur indispensable collaboration et ces moments d’amitié.

Sources
http://www.csmfr.ch/Notre-college/L-Historique
http://www3.orgues-et-vitraux.ch/default.asp/2-0-2639-11-6-1/
http://fr.wikipedia.org/wiki/Coll%C3%A8ge_Saint-Michel_%28Fribourg%29
Le patrimoine campanaire fribourgeois, éditions Pro Fribourg, 2012

Cloches – Ependes (CH-FR) église St Etienne

Ependes église 3-4

C’est à l’architecte romontois Fernand Dumas que nous devons l’actuelle église St Etienne d’Ependes. Consacrée en 1935, elle remplace un ancien édifice détruit par un incendie dans la nuit du 28 au 29 janvier 1933. Cette église est mentionnée pour la première fois en 1453, mais elle devait être beaucoup plus ancienne, car dépeinte après la visite pastorale de Saluces comme « dans un état déplorable » ; murs noircis, fenêtres sans vitrage, sol sans pavage, absence de porte. La nef semble avoir été rebâtie autour de 1580, alors que l’ancien chœur, décrit comme « solidement voûté » par Apollinaire Deillon dans son Dictionnaire historique et statistique des paroisses catholiques du canton de Fribourg, fut reconstruit en 1635 et conservé jusqu’en 1873.

Ependes église incendiée

Ependes, ancienne église après l’incendie de 1933 © Bibliothèque cantonale et universitaire, Fribourg. Collection de cartes postales

L’église n’était au départ couronnée que d’un modeste clocheton. Renversé par un ouragan le 29 janvier 1645 (2 cloches tombèrent, la 3e resta en place), il fut immédiatement remplacé par une tour en hors d’oeuvre. En 1855, Samuel Treboux coule 2 cloches, « la grande d’un poids de 30 quintaux, la petite de 1’265 livres ». Seule la seconde (actuelle cloche no2) nous est parvenue. Les 3 autres cloches furent coulée à Staad (SG) en 1934.

Ependes cloche 1 1934

Fondée en 1873 par Jakob Egger, la fonderie de St Gall passe d’abord brièvement entre les mains de son fils en 1921, avant d’être cédée à Fritz Hamm en 1927. Ce dernier connaît alors une période de prospérité avant de faire faillite en 1940. Les cloches coulées dès 1934 portent simplement la mention « Fonderie de St Gall, usine de Staad ». Parmi les réalisations les plus importantes de cette fonderie, citons les sonneries de Berneck (5 cloches en fa2, 1938) et de Hochdorf (6 cloches en solb2, 1940). Ancien collaborateur de la fonderie de St Gall, Emil Eschmann établit son atelier à Rickenbach (TG) où il coula un grand nombre de cloches dans les années 1960. Dans la région fribourgeoise, les sonneries de l’église Ste Thérèse de Fribourg et de la chapelle de Schwarzsee portent la signature d’Eschmann.

– Cloche 1, dédiée au Christ-Roi, note do#3 -29/100, coulée en 1934 par la fonderie de St Gall
– Cloche 2, note mi3 +27/100, coulée en 1855 par Samuel Treboux à Corsier-s/Vevey
– Cloche 3, note fa3 -37/100, coulée en 1934 par la fonderie de St Gall
– Cloche 4, note la3 -32/100, coulée en 1934 par la fonderie de St Gall
(la3 = 435Hz, déviation en 1/100 de 1/2 ton)

Les 4 cloches sont sonnées à la volée pour chaque office. Régulièrement, de vaillants carillonneurs montent au clocher, souvent suivis par une foule de curieux de tous âges. Nous avons ici une intéressant exemple de ce qu’on pourrait appeler un « quadrillon traditionnel », coutume hélas de plus en plus rare.

La grande cloche, dédiée au Christ-Roi

La cloche 2 est la plus ancienne de la sonnerie. Outre le cartouche de Samuel Treboux, elle est ornée des effigies du Christ en croix, de St Pierre et d’une sainte qui semble arborer un lys et un livre, et qui pourrait bien être Ste Anne, mais cela reste à confirmer

Diverses autres vues de la sonnerie

L’église St Etienne d’Ependes, consacrée en 1935

Mes plus vifs remerciements à M. Jean-Marc Clément, conseiller paroissial, et à son équipe de vaillants carillonneurs François Clément, Charly Cotting et Jean-Marc Santax, pour leur sympathique invitation. Merci également à M. Alexandre Lopez, sacristain, pour son aimable accueil. Remerciements enfin à Guilhem Lavignotte, organiste à Yverdon-les-Bains, pour ses connaissances théologiques.

Sources
– Dictionnaire historique et statistique des paroisses catholiques du canton de Fribourg, volume 5, par Apollinaire Deillon, imprimeur du chroniqueur suisse, Fribourg, 1886
Le patrimoine campanaire fribourgeois, éditions Pro Fribourg, 2012
Ependes et Sales, l’histoire de deux villages de leur origine à nos jours, par Michel Riedo, Pierre-Joseph Clément et Gérard Tornare, Ependes 1993

A consulter
http://www.ependes.ch/fileadmin/PDF/Fichier/Histoire%20Ependes-1.pdf
http://www.paroisse.ch/

Ependes avant 1904

Ependes avant 1904, par Prosper Mache© Bibliothèque cantonale et universitaire de Fribourg. Collection de cartes postales