Archives de catégorie : CH-Vaud

Cloches – Ollon (CH-VD) église réformée St Victor

Un grand cru campanaire dans le vignoble chablaisien !

Ollon clocher depuis en bas

La météo de ce 5 septembre 2015 était peut-être capricieuse, les averses passagères n’ont pas réussi à doucher notre enthousiasme lors de cette belle virée dans le Chablais organisée pour l’anniversaire d’un des nôtres. La première étape de cette journée riche en découvertes  fut l’église réformée d’Ollon, ancienne église St Victor, dont l’élégant clocher à lanternon projette son ombre sur le vignoble depuis 1828. L’édifice attenant est beaucoup plus ancien, même si peu d’éléments médiévaux nous sont parvenus. Le choeur, construit en 1496, est orné d’une grande fresque représentant le Christ et les apôtres. Si la Réforme fut proclamée en ces terres en 1528, nombreux furent, pendant deux siècles, les paroissiens qui se rendaient en cachette chez leurs voisins valaisans et savoyards pour écouter les prêches catholiques organisées spécialement à leur intention dans un but de contre-réforme.

C’est en 1900 déjà que les 4 cloches de l’église réformée d’Ollon furent classées monuments historiques. La cloche no2, datée de 1639, ne nous est toutefois pas parvenue, car sans doute fêlée. Ruetschi la refit en 1962, en ayant le bon goût de reproduire certains de ses motifs. La cloche no3, œuvre du Lausannois Jaquet, est la plus ancienne : 1413. Elle est le témoin de l’activité campanaire dont le chef-lieu vaudois fut le théâtre au Moyen-Age et à la Renaissance. La cloche est ornée de plusieurs croix de St Maurice, marque de son commanditaire d’alors. Elle présente des traces récentes d’accordage. La plus grande, coulée en 1639, ne porte pas de signature. Quant à la plus petite cloche, suspendue dans le lanternon, ses nombreux défauts de coulée ne permettent hélas de déchiffrer le nom d’un quelconque fondeur. Coulée en 1704, elle ne donne habituellement de la voix qu’en solo pour appeler à l’école. Les 4 cloches formant un accord majeur parfait sur mi bémol 3, nous avons toutefois jugé intéressant de les faire sonner à l’unisson pour l’enregistrement présenté ici.

-Cloche 1, note mib3 +19/100, coulée en 1639
-Cloche 2, note sol3 +9/100, coulée en 1639, refaite en 1962 par Ruetschi à Aarau
-Cloche 3, dédiée à St Maurice, note sib3 +36/100, coulée en 1413 par Jaquet de Lausanne
-Cloche 4, cloche de l’école, note mib4 +48/100, coulée en 1704.

Octave inf Prime Tierce min Quinte Octave sup
Cl1 mib3 24.64 111.22 38.43 48.65 19.08
Cl2 sol3 -34.02 -34.02 8.00 -47.32 8.73
Cl3 sib3 -219.44 70.42 -38.54 -110.03 35.82
Cl4 mib4 68.47 41.20 40.74 54.12 48.06

La grande cloche

La cloche 2

La cloche 3

La petite cloche

Mes plus vifs remerciements vont tout d’abord à la commune d’Ollon et aux différents responsables et personnes de contact, MM. Dupertuis, Ruffieux et Voisard. Un grand merci également à mes excellents camarades campanaires, sans qui ce reportage n’aurait pas été possible: Antoine « Les cloches savoyardes », carillonneur à St Maurice et à Taninges; Dominique « Valdom68 », responsable technique des clochers de Val-de-Travers; Guilhem Lavignotte, organiste titulaire à Yverdon-les-Bains.

Sources :
Dictionnaire historique de la Suisse (DHS)
Guide artistique de la Suisse, Société d’histoire de l’art en Suisse
Recensement architectural du canton de Vaud
Inventaire réalisé par Matthias Walter, expert-campanologue à Berne
https://fr.wikipedia.org/wiki/Ollon

A consulter :
http://www.ollon.ch/
http://www.chablais.ch/
http://ollonvillars.eerv.ch/
http://cloches74.com/
https://www.youtube.com/user/valdom68

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Cloches – Le Brassus (CH-VD) temple

Le Brassus temple

Photo Giovanni-P, source Wikipedia

Le temple et la paroisse du Brassus naquirent la même année, à savoir en 1837. Jusqu’alors, les fidèles devaient se rendre chaque dimanche au Sentier, distant de cinq bons kilomètres. C’est le développement industriel et démographique qui rendit nécessaire la construction de ce nouveau lieu de culte dans une région où les hivers sont souvent rudes et les routes difficilement praticables. Le temple fut maintes fois transformé depuis son inauguration. On apprend par exemple – dans le livret édité pour les 150 ans de la paroisse – que l’axe de l’édifice fut changé lors de la restauration de 1955.

Le beau clocher surmonté d’une galerie renferme une intéressante sonnerie de 4 cloches. Les 2 plus grandes sont également les plus anciennes, coulées qu’elles furent par François Humbert de Morteau pour la construction du temple. La cloche no3 fut financée par souscription publique et ajoutée en 1987 par Ruetschi d’Aarau pour les 150 ans du temple. L’histoire de la petite cloche est la plus tourmentée. Un article publié en 1963 dans la Feuille d’Avis de la Vallée de Joux nous apprend qu’une cloche, coulée en 1825 pour la nouvelle école du Brassus, financée par un généreux donateur, rejoignit le clocher du temple en 1852. Sans doute endommagée lors de son transport, ladite cloche fêla très vite. Ce n’est qu’en 1902 que les finances permirent de racheter d’occasion une cloche coulée en 1846 par Samuel Treboux de Corsier-s/Vevey. Il est triste de constater que les inscriptions indiquant la provenance de cette petite cloche ont été par la suite impitoyablement  limées, coupant ainsi cette intéressante pièce de bronze de son histoire. On sait seulement qu’elle avait été coulée pour un autre clocher vaudois, l’écusson du canton ayant été préservé sur sa robe, au même titre que sa date de coulée et le cartouche du fondeur. On peut imaginer que cette cloche provient du grand chantier d’harmonisation et d’échange de cloches vaudoises mené par Auguste Thybaud entre la fin du XIXe et le début du XXe siècle. Si le manque d’homogénéité de la sonnerie fut signalé en 1902 déjà, ce n’est que 50 ans plus tard que cette petite cloche fut corrigée pour abaisser sa note d’un demi-ton. L’ensemble fut motorisé en 1963.

-Cloche 1, note ré#3 +44/100, diamètre 120cm, poids 967kg, coulée en 1836 par François Humbert de Morteau
-Cloche 2, note fa#3 +29/100, diamètre 100cm, poids 562kg, coulée en 1836 par François Humbert de Morteau
-Cloche 3, note sol#3 +50/100, diamètre 92cm, poids 460kg, coulée en 1987 par Ruetschi d’Aarau
-Cloche 4, note la#3 +69/100, diamètre 81 cm, poids 300kg, coulée en 1846 par Samuel Treboux à Corsier-s-/Vevey

La3 = 435Hz, déviation en 1/100 de 1/2 ton

Octave inf Prime Tierce min Quinte Octave sup
Cloche 1 ré#2 -43 ré#3 +173 fa#3 +61 la#3 +15 ré#4 +44
Cloche 2 fa#2 -57 fa#3 +155 la3 +43 do#4 -13 fa#4 +29
Cloche 3 sol#2 +23 sol#3 +56 si3 +65 ré#4 -1 sol#4 +50
Cloche 4 la#2 +106 la#3 +88 do#4 +86 fa4 +145 la#4 +69

Les 2 grandes cloches

La cloche 3

La petite cloche

Dans le clocher se trouvent également une horloge mécanique Baer avec remontage automatique des poids et cames pour déclenchement des volées automatiques, ainsi que les anciens battants des cloches

Mes plus vifs remerciements à M. Daniel Trotti, du service d’exploitation des bâtiments de la commune du Chenit, pour son aimable autorisation, ainsi qu’à M. Olivier Lanthemann, concierge, pour son accueil et sa disponibilité. Merci également à mes excellents camarades campanaires Antoine, carillonneur à Taninges; John Brechbühl, membre de la GCCS et Guilhem Lavignotte, organiste à Yverdon-les-Bains, pour leur précieuse collaboration et les bons moments de partage.

Sources
http://www.histoirevalleedejoux.ch

A consulter
http://www.communeduchenit.ch/
http://www.myvalleedejoux.ch/
http://lavallee.eerv.ch/

Cloches – Yverdon-les-Bains (CH-VD) temple Pestalozzi

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Jadis « Temple National » ou plus simplement « Temple d’Yverdon », le temple Pestalozzi fut rebaptisé ainsi il y a quelques années en hommage célèbre pédagogue et humaniste suisse, qui ouvrit dans la cité thermale une école pour enfants pauvres de 1804 à 1824. L’impressionnante façade néoclassique en pierres jaunes de Neuchâtel arbore sur son fronton les tables de la loi, mais aussi et surtout l’Oeil de Dieu, motif qu’on retrouve sur d’autres édifices réformés contemporains de Suisse, à savoir le temple de Morges, l’église St Laurent de Lausanne, ou encore l’église du Christ-Roi de Berne. Construit entre 1753 et 1757 sur les plans de l’architecte genevois Jean-Michel Billion, le temple Pestalozzi remplace une ancienne église médiévale dont subsiste le clocher ainsi que les magnifiques stalles gothiques. Remarquable est également l’orgue Potier, construit en 1766, dont certains jeux d’origine ont été conservés.

Dans la Revue Historique Vaudoise no68, éditée en 1960, Georges Kasser s’est fendu d’une étude relativement complète de la sonnerie du temple Pestalozzi . On y apprend tout d’abord que l’imposant clocher – mentionné dès le XIVe siècle – remplissait également au Moyen-Age le rôle d’ouvrage défensif. Le couronnement actuel (chambre du guetteur, cadrans à pignons, flèche en tuf) date de 1609. Les 6 cloches, toutes antérieures au temple du XVIIIe siècle, forment un des ensembles campanaires historiques les plus remarquables de Suisse. La plus grande, œuvre des Soleurois Urs Scherer et Gabriel Murer, ne fut pas coulée sur place, mais amenée par barque depuis Soleure en 1646. Les 5 autres cloches, toutes fondues au XVe siècle, ont été réalisées par différents fondeurs. Guillaume Chaufourne, d’Orbe (et non Guillaume Fribor, comme supposé par Kasser) fondit les cloches 3 et 4 en 1422 (merci à Matthias Walter, expert-campanologue à Berne). Nicod Buaron, de St Prex, et Jean Olivey, originaire de Bavois, coulèrent la cloche 2 en 1463. Les registres communaux de 1491 ayant malheureusement été égarés, le doute plane sur la provenance des 2 plus petites cloches datées de cette fameuse année, et vraisemblablement réalisées par le même fondeur. Détail intéressant: la cloche no6 semble avoir sonné à l’origine dans le clocheton de l’ancien hôpital. Les cloches nos 1-2-4-5 sont situées dans la tour, les nos 3 et 6 sont accrochées dans la flèche. Il y a fort à parier que ces deux dernières cloches, aux vues de leur situation et de leurs notes musicales, remplissaient jadis uniquement le rôle de cloches civiles (tintement et tocsin) avant l’électrification de la sonnerie.

-Cloche 1, « Cloche du Feu » (sonne quotidiennement à midi), note ré3 +39/100, diamètre 144cm, poids environ 1’660kg, coulée en 1646 par Urs Scherer et Gabriel Murer à Soleure
-Cloche 2, « Cloche du Conseil » (sonne aujourd’hui encore pour les élections), note fa3 +41/100, diamètre 118cm,  poids 920kg, coulée en 1463 par Nicod Buaron de St Prex, et Jean Olivey de Bavois
-Cloche 3, note sol3 +104/100, diamètre 98cm, poids environ 490kg, coulée en 1422 par Guillaume Chaufourne d’Orbe.
-Cloche 4, « La Pleureuse » (ancien glas, aujourd’hui cloche du couvre-feu), note la3 +39/100, diamètre 92cm, poids environ 420kg, coulée en 1422 par Guillaume Chaufourne d’Orbe.
-Cloche 5, note do4 +74/100, diamètre 76cm, poids environ 266kg, coulée en 1491
-Cloche 6, note ré4 +25/100, diamètre 68cm, coulée en 1491

La3 = 435Hz, déviation en 1/100 de 1/2 ton

Octave inf. Prime Tierce min. Quinte Octave sup.
Cloche 1 ré2 -75 ré3 -57 fa3 -16 la3 -77 ré4 +39
Cloche 2 fa2 +72 fa3 -47 lab3 +43 do4 +87 fa4 +41
Cloche 3 sol2 +46 sol3 +81 sib3 +103 ré4 -29 sol4 +104
Cloche 4 la2 +12 la3 -86 do4 +16 mi4 -18 la4 +39
Cloche 5 do3 -38 do4 -188 mib4 +19 sol4 -140 do5 +74
Cloche 6 ré3 -75 ré4 -201 fa4 -37 la4 -150 ré5 +25

La grande cloche

La cloche 2

La cloche 3

La cloche 4

La cloche 5

La petite cloche

Mes plus vifs remerciements à M. Guilhem Lavignotte, organiste titulaire, pour l’accès au clocher. Merci également à mes excellents camarades campanaires Antoine, carillonneur à Taninges, et John Brechbühl, membre de la GCCS, pour leur indispensable collaboration et les sympathiques échanges. C’est avec plaisir et émotion qu’il m’a été donné et de revoir et réentendre les cloches qui ont bercé toute mon enfance, celles de ma ville natale.

Sources:
« Les cloches de l’église paroissiale d’Yverdon », par Georges Kasser, article paru dans le numéro 68 de la Revue Historique vaudoise (1960)
« Le patrimoine campanaire fribourgeois », éditions Pro Fribourg, 2012
http://www3.orgues-et-vitraux.ch/default.asp/2-0-1944-11-6-1/
https://fr.wikipedia.org/wiki/Temple_d%27Yverdon-les-Bains
https://fr.wikipedia.org/wiki/Johann_Heinrich_Pestalozzi

A consulter:
http://www.yverdon-les-bains.ch/
http://www.yverdonlesbainsregion.ch/
http://yverdontemple.eerv.ch/

Cloches – Daillens (CH-VD) temple

Daillens temple ext

Source : http://penthalaz.eerv.ch/cultes/

Les premières mentions de l’église de Daillens remontent à la fin du XIIe siècle. Le clocher – probablement une ancienne tour de défense – date du siècle suivant. Suite à l’invasion bernoise et à l’introduction de la Réforme en terre vaudoise, la nef médiévale est élargie et l’ancien chœur abandonné. L’église subit à nouveau plusieurs modifications au fil des ans : pose d’une horloge en 1818, création d’un local pour les pompiers en 1874, pose de vitraux en 1893 , création de peintures décoratives par Ernest Correvon de 1923 à 1925, puis restauration complète entre 1967 et 1968. Au début des années 2000, suite à un problème d’humidité, est mis au jour un important décor peint dans le chœur sous le clocher. Ces fresques, qui remontent au début du XIVe siècle, ont été préservées du temps par la couche de chaux appliquée à la Réforme pour les dissimuler. En janvier 2015, enfin, 3 tombes datant de la fin du XVIIe siècle, sont découvertes dans le chœur, lors de travaux de rénovation.

« A Daillens, les cloches ne sont pas celles qu’on croit ». Ainsi titrait, le 22 octobre 1994, le journal vaudois « 24 heures ». On pouvait lire à l’époque la stupeur et le dégoût des habitants du village suite à un soi-disant acte délibéré de vandalisme sur 2 des 3 cloches. Des vilaines rumeurs avaient même insinué la culpabilité de certains habitants, empoisonnant ainsi la vie de la communauté. Ce n’est que tout récemment, lors de l’attribution de la rénovation de la sonnerie à la maison Mécatal, que fut découvert le pot aux roses : la plus grande cloche, victime d’un moteur mal réglé, est simplement venue heurter sa voisine du dessus, causant ainsi de sévères dommages aux 2 pièces maîtresses de la sonnerie. La présence dans le clocher de nombreux débris ornés de différentes couches de patine atteste même du fait que les 2 dames de bronze sont entrées en collision plus d’une fois ! Bilan : de nombreuses ébréchures sur la pince des 2 grandes cloches, et même une fêlure dans la robe de la plus grande. Le savoir-faire de Jean-Paul Schorderet n’est pas seulement venu à bout d’une vilaine rumeur villageoise persistante : le campaniste fribourgeois a également redonné vie – et de fort belle manière – aux 3 cloches si chères au poète vaudois Jean Villard-Gilles dans son lieu d’origine.

La sonnerie du temple de Daillens se compose donc de 3 cloches de différentes époques. La plus petite, ornée d’inscriptions gothiques, mentionne la date de 1497. La cloche moyenne, coulée en 1826, porte la signature du Morgien Jean-Louis Golay. La plus grande, enfin, fut ajoutée en 1980 par la maison argovienne Ruetschi. Ces 3 voix à l’unisson égrènent un motif « te deum » un peu faussé, mais charmant, dont la légèreté de ton contraste avec l’aspect massif du vénérable clocher.

-Cloche 1, note si3 -19/100, diamètre 83cm, poids 338kg, coulée en 1980 par Ruetschi d’Aarau
-Cloche 2, note ré4 -50/100, diamètre 71cm, poids 229kg, coulée en 1826 par Jean-Louis Golay de Morges
-Cloche 3, note mi4 +11/100, diamètre 67cm, poids environ 190kg, coulée en 1494

La3 = 435Hz, déviation en 1/100 de 1/2 ton

Octave inf Prime Tierce min Quinte Octave sup
Cloche 1 si2 -22 si3 -8 ré 4 +7 fa#4 -1 si4 -19
Cloche 2 ré3 -20 ré4 -142 fa4 -60 la4 +78 ré5 -50
Cloche 3 mi3 +11 mi4 -226 sol4 -23 si4 -66 mi5 +11

La grande cloche

La cloche 2

La petite cloche

Mes plus vifs remerciements à M. Jean-Paul Schorderet, campaniste, directeur de la maison Mécatal, de m’avoir convié aux différentes étapes de la réparation des cloches et à leur remise en service.

Daillens JPS

Le campaniste Jean-Paul Schorderet et les 3 cloches de Daillens prêtes à reprendre du service (photo Vanessa Cardoso, journal « 24 heures » du 11 juillet 2015)

Sources :
http://www.24heures.ch/vaud-regions/lausanne-region/vingt-ans-cloches-vandalisees/story/11305848
https://fr.wikipedia.org/wiki/Temple_de_Daillens

A consulter :
http://www.mecatal.ch/
http://www.daillens.ch/
http://penthalaz.eerv.ch/

Cloches – Vallorbe (CH-VD) temple

Temple Vallorbe archives

Le temple de Vallorbe entre 1915 et 1938, Bibliothèque Nationale Suisse

29 mètres de longueur sur 16 mètres de largueur… le temple de Vallorbe fait partie des grands temples de campagne vaudois. L’ancienne église, dédiée à St Pancrace, citée en 1139 déjà, faisait partie d’un prieuré clunisien appartenant à la puissante abbatiale de Romainmôtier, distante d’une dizaine de kilomètres. Affectée au culte protestant dès la Réforme en 1536, l’église, se délabrant peu à peu, fut reconstruite de 1711 à 1712 sur les plans de Jean-Gaspard Martin, architecte bernois établi à Yverdon, à qui ont doit également le temple du village voisin de Ballaigues, édifié simultanément. Ce sont Leurs Excellences de Berne qui ont assuré une bonne partie du financement. Construit plus près du centre de la localité, ce nouveau temple au chevet à 5 pans se dresse à l’emplacement de l’ancienne tour de l’horloge communale, reconstruite en clocher-porche. Si la silhouette extérieure de l’édifice n’a guère évolué depuis le XVIIIe siècle, l’intérieur fut profondément remanié au fil des siècles, notamment en 1937.

Si riche soit la documentation au sujet du temple et de son histoire, l’élaboration de la sonnerie n’occupe – elle – qu’un petit paragraphe du remarquable rapport rédigé par Catherine Schmutz-Nicod, historienne des monuments. On y apprend toutefois que la seule cloche historique encore existante date de 1666. Dans le Conteur Vaudois du 24 septembre 1927, F-Raoul Campiche écrit que cette cloche, richement décorée, est l’œuvre de Jean-Baptiste Livremont de Pontarlier. Sa note (do4) ne s’harmonisant pas avec les 3 autres cloches (accord majeur de ré), il fut décidé en 1915 de placer cette petite cloche dans le clocheton du nouveau collège, tout juste inauguré. La sonnerie actuelle du temple est composée de 3 cloches du XIXe siècle. La plus grande porte le sceau de Borle-Borel. Cette famille de fondeurs neuchâtelois a œuvré durant la première moitié du XIXe siècle de part et d’autre de l’actuelle frontière franco-suisse. Si la plupart de leurs cloches ont été coulées à Couvet (c’est le cas de la grande cloche de Vallorbe) certaines – comme la cloche de l’Hôtel de Ville de Boudry – furent élaborées à Pontarlier. Les 2 plus petites cloches du temple de Vallorbe sont signées Gustave Treboux de Vevey. La sonnerie porte des traces d’accordage. L’emplacement de la petite cloche en bout de travée s’explique par le fait que la cloche historique de 1666 sonnait jadis face à elle. Les archives font mention de 2 horloges mécaniques successives, la première réalisée par Jean-Pierre Brocard de Vallorbe en 1719, la seconde construite par Prost de Morez et installée par Jaquet et Maillefer de Vallorbe en 1888. Ces mouvements ont aujourd’hui disparu du clocher, l’heure est actuellement gérée par une horloge-mère BTE6 de Bodet et tintée au moyen d’électro-marteaux. Les cloches 2 et 3 possèdent encore leurs moutons en chêne d’origine, alors que la grande cloche est accrochée à un joug en acier.

– Cloche 1, « Conseillère », note ré3 +17/100, coulée en 1830 par Borle-Borel à Couvet
– Cloche 2, note fa#3 -16/100, coulée en 1876 par Gustave Treboux Vevey
– Cloche 3, note la3 +14/100, coulée en 1876 par Gustave Treboux Vevey

Analyse (la3 = 435Hz, déviation en 1/100 de 1/2 ton)

Octave inf Prime Tierce min Quinte Octave sup
Cloche 1 ré2 -100/100 ré3 -81/100 fa3 +9/100 la3 +16/100 ré4 +16/100
Cloche 2 fa#2 +48/100 fa#3 +75/100 la3 +12/100 do#4 +-0/100 fa#4 -156/100
Cloche 3 la2 +967/100 la3 +74/100 do4 +39/100 mi4 +148/100 la4 +14/100

Remerciements à l’équipe pastorale présente lors de ma visite pour l’autorisation d’accès au clocher à l’occasion de la sonnerie dominicale. Amitiés à mon camarade campanaire John Brechbühl, membre de la GCCS, pour la prise de son extérieure.

Sources :
Le temple de  Vallorbe – 300 ans d’histoire architecturale, rapport rédigé parCatherine Schmutz-Nicod, avec la collaboration de Tamara Robbiani.
Le Conteur vaudois, édition du 27 septembre 1927
Histoire de la pendulerie neuchâteloise, par Alfred Chapuis, éditions Paris et Neuchâtel, 1917

A consulter :
http://www.vallorbe.ch/
http://vallorbe.eerv.ch/
www.swissisland.ch/

Cloches – Bonvillars (CH-VD) temple réformé et ancienne église St Nicolas

P1050347

Il est des endroits magiques qui nous séduisent instantanément, tant par leur aspect attachant que par leur situation bucolique. Dans le cas du temple de Bonvillars à la silhouette si particulière, idéalement située entre vignobles et lac, on peut ajouter une bonne dose d’histoire. Dédiée à St Nicolas, cette filiale du prieuré de Baulmes figurait en 1148 déjà dans les possessions du couvent de Payerne. Il en fut ainsi jusqu’à la Réforme. Si de nombreuses églises recèlent des éléments architecturaux de différentes époques, il est rare de trouver une telle continuité au sein d’une seule et même édifice. L’élément le plus ancien est sans nul doute la colonne romaine (1er ou 2e siècle ap JC) soutenant le portail ogival de la chapelle nord. Côté sud, on trouve d’intéressants ornements du XIIe siècle, dont certains ont malheureusement été abîmés à la Réforme. Le chœur remonte aux XIIIe et XIVe siècles. Après sa reconversion en lieu de culte protestant, le temple subit encore bien des travaux, dont l’agrandissement de la nef au sud. C’est ce qui donne aujourd’hui encore cette asymétrie des plus plaisantes à ce vénérable édifice.

Le clocher, à cheval sur le transept, semble dater du XVe ou du XVIe siècle. Si sa flèche de pierre rappelle irrésistiblement le style de la vallée du Rhône, ses 4 pignons nous font penser au temple d’Yverdon-les-Bains, distant de quelques kilomètres seulement. Enveloppé de zinc et pourvu de clochetons – sans doute à la Belle-Epoque – le couronnement a perdu son aspect heimatstil lors de la restauration d’envergure dans les années 1970. Ont ainsi été remises au jour les petites gargouilles représentant les symboles des 4 évangélistes : l’homme pour Mathieu, le lion pour Marc, le taureau pour Luc et l’aigle pour Jean. Derrière les baies géminées se cachent 2 cloches gothiques d’une grande valeur historique. La plus petite, à la pince fortement abîmée, porte la date de 1524. La plus grande, qui tinte les heures et sonne en volée à midi, semble dater du XVe siècle. Le campanologue bernois Matthias Walter – qui l’a vue en photo – estime qu’il n’est pas impossible que cette cloche soit l’œuvre de la dynastie Follare, qui a engendré les premiers représentants d’une longue lignée de fondeurs fribourgeois.

-Cloche 1, note sol#3 -5/100, diamètre 101cm, XVe siècle
-Cloche 2, note la3 -14/100, diamètre 90cm, coulée en 1524

Analyse (la3=435Hz, déviation en 1/100 de 1/2 ton)

Octave inf Prime Tierce min Quinte Octave sup
Cloche 1 sol#2 -107/100 sol#3 -129/100 si3 -59/100 ré#4 -43/100 sol#4 -5/100
Cloche 2 la2 -180/100 la3 -28/100 do4 -101/100 mi4 +116/100 la4 -14/100

La grande cloche

La petite cloche

L’ancienne horloge électro-mécanique

Mes plus vifs remerciements à M. Frédéric Piguet, syndic de Bonvillars, pour son chaleureux accueil, la documentation fournie et le verre de l’amitié. Amitiés à mes camarades campanaires Guilhem Lavignotte, organiste à Yverdon-les-Bains, et Dominique « Valdom68 », responsable technique des clochers de la commune de Val-de-Travers.

Source:
Bonvillars, au travers des écrits communaux, par Susanne Fontannaz-Jaquier, Imprimerie Cavin à Grandson, novembre 2001.

http://www.bonvillars.ch/
http://larnon.eerv.ch/

Cloches – Corseaux (CH-VD) collège

Corseaux journal Corsal'infos septembre 2014

En septembre 2014 paraissait dans le journal d’information communal de Corseaux l’article ci-dessus. Contacté peu avant par Priska Hess, journaliste, j’ai eu l’envie de me rendre sur place pour y effectuer les traditionnelles photos et enregistrements. Les archives qu’il m’a été donné de consulter et les renseignements fournis par des spécialistes de l’horlogerie monumentale me permettent aujourd’hui de vous livrer quelques détails supplémentaires au sujet de cette remarquable installation. Dans la vidéo ci-dessous, pour commencer, vous pouvez voir et entendre le carillon – toujours actionné par sa mécanique d’origine – jouer la Chanson des vieux Maïentzets, d’Emile-Jacques Dalcroze. S’ensuit une courte sonnerie de la cloche à la volée.

Corseaux Reymond cloches tubulairesDans la correspondance archivée entre l’horloger Paul Reymond et la commune de Corseaux (photo, cliquer pour agrandir), on apprend que le carillon a d’abord été logé dans le clocheton. Le volume sonore dégagé n’étant pas satisfaisant, il a rapidement été déménagé sur la galerie en plein air derrière le clocheton. Non signées, les cloches ont vraisemblablement été fournies par la maison Odobey de Morez (F-39) qui disposait de tout un réseau de petits horlogers-revendeurs en France et à l’étranger. On rencontre par exemple à l’église Notre-Dame de Vevey, située à quelques kilomètres de là, des cloches de carillon signées Odobey. Mais comme l’indique l’excellent site internet www.horloge-edifice.fr, il est peu probable que cet horloger, pourtant talentueux, ait lui-même coulé ses cloches. Daniel Fonlupt, conservateur du remarquable musée d’horlogerie monumentale La Maison des Horloges à Charroux (F-03), possède dans son impressionnante collection un extrait de la correspondance entre la maison Odobey et le fondeur Burdin aîné de Lyon au sujet de la commande de cloches.

Corseaux affiche Odobey

Les archives corsalines mentionnent que si certaines cloches dissonantes du carillon ont pu être corrigées, le do#5 – particulièrement faux – a nécessité une refonte. Cette cloche semble d’ailleurs avoir été refaite par un autre fondeur: son profil diffère de celui de ses sœurs.  Dans ses échanges épistolaires avec les autorités corsalines, Reymond se plaignait justement du fait que son litige avec la commune durait depuis si longtemps que son fournisseur refusait dorénavant de prendre en charge la refonte de la cloche litigieuse.

A l’instar de la maison Crot à Granges (CH-VD), Reymond semble s’être fait livrer ses pièces détachées par des fabricants étrangers. Si Crot apposait sa signature sur les modèles qu’il installait (châssis, cadrans), le mécanisme que nous avons ici ne porte ni marque, ni tampon. L’horloge de Corseaux a indubitablement été conçue et fabriquée par Louis-Delphin Odobey de Morez (F-39). Le mouvement horaire est muni d’un remontoir d’égalité qui transmet son impulsion aux aiguilles toutes les 4 secondes. En plus d’actionner le marteau de la cloche des heures, le mouvement dispose d’un tambour conçu pour jouer alternativement 2 mélodies sur les 8 cloches du carillon. Le remontage des poids a été automatisé par la maison Baer à Sumiswald (CH-BE), fusionnée depuis peu avec une autre entreprise active dans l’entretien des clochers: Muri

Louis-Delphin Odobey (1827-1906) créa en 1858 à Morez (F-39) ce qui fut l’une des plus importantes maisons d’horlogerie d’édifice de France. La société fut ensuite reprise par trois de ses fils, Victor (appelé Émile), Jules et Albert. Ce dernier resta bientôt seul aux commandes de l’entreprise avant de la céder à son tour à son fils Georges, qui poursuivit ses activités jusqu’en 1964. Signalons qu’en 1880, le fils aîné de Louis-Delphin, Paul, créa lui aussi son entreprise d’horloges d’édifice. Des horloges Odobey furent installées dans toute la France et l’étranger. Ce succès s’explique par le fait que ces mécaniques étaient remarquables du point de vue de leur conception et de leur exécution.

Corseaux affiche Odobey prospectus

Le clocheton abrite une cloche à la volée qui donne aujourd’hui encore de la voix tous les matins pour appeler les élèves. Cette cloche porte la date de 1904 et la signature conjointe d’Henry Matthey, de Vallorbe, et de Paul Reymond, du Brassus. Comme déjà expliqué dans l’article au sujet de la sonnerie du temple d’Apples, la fonderie Matthey ne brilla pas par son habileté. Alors que les cloches d’Apples furent refondues seulement 3 ans après avoir été livrées (l’une fêla très vite, les autres rendaient un son peu satisfaisant), celle que nous avons ici a été conservée. On est sans doute moins regardant sur la qualité sonore d’une cloche d’école.

Il suffit de prêter une oreille à la cloche à la volée du collège de Corseaux pour s’apercevoir que ses harmoniques sont complètement faussés (voir analyse ci-dessous) et que sa résonance est extrêmement courte (mauvais bronze). Il est toutefois intéressant de trouver aujourd’hui encore des cloches de fondeurs à la production aussi confidentielle. A l’image d’une pièce de monnaie rarissime que les collectionneurs s’arracheraient pour ses erreurs de fabrication, nous sommes ici en présence d’un collector.

octave inf prime tierce min quinte octave sup
ré#3 -157/100 ré#4 -126/100 fa#4 -59/100 la#4 -190/100 ré#5 -15/100

– Cloche à la volée : note ré#4 -15/100 (la3=435), coulée en 1905, signée Henry Matthey de Vallorbe et Paul Reymond du Brassus
– Carillon diatonique de 8 cloches (la4 ->la5), non signé, vraisemblablement fourni par Odobey, issu de 2 coulées différentes

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Remerciements à:
– Jean-Claude Decurnex, intendant, pour son aimable accueil.
– Priska Hess, journaliste, pour les archives corsalines.
– Daniel Fonlupt, conservateur de la Maison des Horloges à Charroux, pour les précieux renseignements au sujet de l’horloge.
– Dominique « Valdom 68 », responsable technique des cloches de Val-de-Travers, pour la séquence filmée du mouvement d’horloge

A consulter:
http://www.corseaux.ch/
http://horloges.charroux.com/
http://www.horloge-edifice.fr/
http://muribaer.ch/

Cloches – Bursins (CH-VD) temple

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Implantée sur les fondations d’une ancienne villa romaine, l’église St Martin de Bursins remonte sans doute au VIIIe siècle. Attesté dès 1011, l’édifice, de style roman, possédait alors un transept saillant sur lequel se greffaient une abside et deux absidioles. Vers 1472, le délabrement de l’ensemble entraîne la démolition partielle de la nef et de l’ancienne cure. Le chœur prend alors l’aspect que nous lui connaissons aujourd’hui avec son chevet polygonal. Le clocher est également reconstruit à cette même époque. La chapelle Saint-Nicolas, de style gothique flamboyant, est achevée vers 1518. Après la conquête bernoise et la Réforme, l’église devient temple protestant. Diverses transformations seront encore menées au XVIIIe siècle : percement de 3 grandes fenêtres dans la nef,  construction d’une voûte lambrissée en berceau, pose d’un nouveau plafond en plâtre sur la nef. Notons enfin l’importante portante restauration de 1901 à 1903, qui conduira – entre autres – à la pose de 2 nouvelles cloches. Bursins fait partie depuis 2004 de la Fédération des Sites Clunisiens d’Europe. Le temple, de même que la cure et la maison forte attenante (ancien prieuré), sont inscrits comme biens culturels d’importance nationale.

Les 4 cloches proviennent de 3 fondeurs de différentes époques. La cloche no3 est la plus ancienne. De facture gothique, elle semble avoir été coulée entre la fin du XVe et le début du XVIe siècle. La plus petite cloche (no4) porte la signature de deux saintiers originaires du Bassigny, qui ont notamment œuvré en Haute-Savoie et en Franche-Comté : Jean-Baptiste Durand et Nicolas Boulanger. Les 2 plus grandes cloches, coulées par Jules Robert de Nancy, sont aussi les plus récentes, puisque comme indiqué plus haut, elles ont été installées en 1902.

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– Cloche 1, note fa#3 +31/100, diamètre 106cm, poids environ 760kg, coulée en 1902 par Jules Robert de Nancy
– Cloche 2, note la#3 +21/100, diamètre 86cm, poids environ 380kg, coulée en 1902 par Jules Robert de Nancy
– Cloche 3, note do#4 +47/100, diamètre 71cm, poids environ 210kg,  coulée fin XVe – début XVIe
– Cloche 4, note ré#4 +33/100, diamètre 61cm, poids environ 145kg, coulée en 1723 par Jean-Baptiste Durand et Nicolas Boulanger

Analyse (la3=435Hz, déviation en 1/100 de 1/2 ton)

Octave inf Prime Tierce min Quinte Octave sup
Cloche 1 fa#2 +38 fa#3 +24 si3 +39 do#4 +21 fa#4 +31
Cloche 2 la#2 +4 la#3 +19 do#4 +28 fa4 +9 la#4 +21
Cloche 3 do#3 -77 do#4 -55 mi4 +30 sol#4 -152 do#5 +47
Cloche 4 ré#3 +30 ré#4 -129 fa#4 +24 la#4 +12 ré#5 +33

Cloche 1

Cloche 2

Cloche 3

Cloche 4

Mes plus vifs remerciements à M. Philippe Parmelin, syndic de Bursins, pour sa disponibilité. Merci à Thomas Burkart, campaniste chez Muff, pour avoir attiré mon attention sur cette sonnerie dont il a récemment rénové l’équipement. Amitiés à mes camarades campanaires Antoine « Les Cloches Savoyardes », carillonneur à Taninges (F-74) et Dominique « Valdom68 », responsable technique des clochers de Val-de-Travers (CH-NE).

A consulter :
Sites clunisiens en Europe, éditions Gaud, 2004
Enquêtes campanaires, de Joseph Berthelé, Imprimerie Delord-Boehn et Martial, 1903
http://fr.wikipedia.org/wiki/Temple_de_Bursins
http://coeurdelacote.eerv.ch/
http://www.bursins.ch/
http://www.muffag.ch
http://cloches74.com/
https://www.youtube.com/user/valdom68

Cloches – Ballens (CH-VD) temple réformé

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Curieux édifice que le temple de Ballens. Ses origines semblent très anciennes, sans qu’aucun document ne vienne préciser de date exacte. Des fouilles ont permis de mettre au jour des ossements témoignant d’un très vieux cimetière. Alors que les baies de la nef sont gothiques, le chœur, avec sa voûte en berceau brisé, est sans doute plus ancien. La tour, vraisemblablement élevée en 1715, se terminait jadis par une terrasse sur laquelle reposait une petite chambre des cloches couronnée d’une flèche. Ce n’est que vers le milieu du XXe siècle que le clocher a pris l’aspect que nous lui connaissons.

Ballens ancien clocherComme expliqué plus haut, les cloches logeaient jadis dans un petit espace sur la terrasse du clocher (photo, cliquer pour agrandir). Il n’est dès lors pas étonnant que la sonnerie puisse paraître sous-dimensionnée par rapport à l’actuelle vaste chambre des cloches. L’ensemble est toutefois des plus intéressants. Se côtoient en effet ici la première et la dernière génération de fondeurs veveysans, respectivement Jean Richenet (1675) et Gustave Tréboux (1885). Notons également la présence de Martin Emery (1715), fondeur établi à Genève, dont il ne reste aujourd’hui plus aucune cloche dans sa ville d’adoption.

– Cloche 1, note sib3 +2, diamètre 81cm, poids environ 350kg, coulée en 1885 par Gustave Treboux à Vevey
– Cloche 2, note réb4 +5, diamètre 71cm, poids environ 250kg, coulée en 1715 par Martin Emery de Genève
– Cloche 3, note mib4 +7, diamètre 64.5cm, poids environ 150kg, coulée en 1675 par Jean Richenet établi à Vevey

Analyse (la3=435Hz, déviation en 1/16 de 1/2 ton)

Octave inf Prime Tierce min Quinte Octave sup
Cloche 1 sib2 +5 sib3 -1 réb4 +3 fa4 -17 sib4 +2
Cloche 2 réb3 -1 réb4 +19 mi4 +10 lab4 -1 réb5 +5
Cloche 3 mib3 -21 mib4 +1 sob4 +/-0 sib4 -18 mib5 +7

Cloche1

Cloche 2

Cloche 3

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Martin Emery 1696 Colombier-s-MNé à Colovrex (à l’époque dans le Pays-de-Gex) vers 1580, Martin Emery I s’établit à Genève vers 1602, avant de devenir bourgeois de la ville en 1634. Il y mourut en 1645. Fondeur de bronze, il était avant tout réputé pour ses pièces d’artillerie. Son filleul, Martin II (1643-1723) reprit l’atelier de son parrain, alors que les descendants de Martin I furent Maîtres de la Monnaie à Genève. En 1911 disparut de Chancy la dernière cloche genevoise signée Emery (Martin I, 1636). Le canton de Vaud a su se montrer plus conservateur: outre celle de Ballens, une cloche signée Martin II, datée de 1696 (photo, cliquer pour agrandir) se trouve à Colombier-s/Morges.

Le temple, ses vitraux signés Bernard Viglino (1957) et son orgue de la Manufacture des Grandes Orgues Genève (1957)

Remerciements à la Municipalité de Ballens pour son aimable autorisation. Amitiés à mes excellents camarades campanaires Antoine « Les Cloches Savoyardes », carillonneur à Taninges (F-74), Dominique « Valdom68 », responsable technique des clochers de Val-de-Travers, et Guilhem Lavignotte, organiste à Yverdon-les-Bains.

A consulter:
http://www.ballens.ch/
http://pieddujura.eerv.ch/
http://www3.orgues-et-vitraux.ch/default.asp/2-0-2730-11-6-1/
Dictionnaire des Artistes Suisses/Schweizerisches Künstler-Lexikon, de Carl Brun, éditions Huber & Cie, 1905

Cloches – Apples (CH-VD) temple réformé

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Les premiers signes d’occupation du territoire d’Apples remontent à l’époque gallo-romaine. Des fouilles menées dans le sous-sol de l’église ont permis de mettre au jour les fondations d’une chapelle construite vers l’an 800. Une église romane plus vaste la remplaça en 1350. Son clocher trapu et à peine plus élevé que la nef fut abattu et remplacé par une tour plus élancée en 1770. Les transformations de 1838 firent perdre à l’édifice ses caractéristiques médiévales. Ce n’est qu’avec la réfection de 1957 que le temple d’Apples retrouva sa silhouette romane et prit l’aspect que nous lui connaissons aujourd’hui. En 1997, de nouvelles orgues de la manufacture Muhleisen de Strasbourg sont installées.

Si l’histoire de l’église nous semble quelque peu tourmentée, ce n’est rien en comparaison des mésaventures rencontrées par la sonnerie au cours de sa longue élaboration ! Depuis le XIVe siècle, Apples compte 2 cloches, la plus petite datée de 1624, d’un poids de 180 kg. Le 13 janvier 1709, la plus grande cloche se fissure. On demande alors à Reverolle, dont les fidèles viennent régulièrement assister au culte à Apples, de participer aux frais, ce qu’ils refusent. Une nouvelle cloche est toutefois livrée en 1710. Elle sera refondue en 1777 par Jean-Daniel Dreffet de Genève. En 1904, Henry Matthey de Vallorbe livre 3 nouvelles cloches, dont l’une coulée avec le bronze de la cloche Dreffet. 6 mois plus tard, la plus grosse des nouvelles cloches est déjà fêlée, et les 2 autres sont de qualité douteuse. S’ensuit un long procès au terme duquel Matthey est contraint de verser une indemnité de 2’300 francs. En 1906, une délégation d’Apples se rend à Bulle, où Georges et Francisque Paccard viennent de livrer la magnifique sonnerie monumentale de l’église St Pierre-aux-Liens. Il est alors passé commande au fondeur savoyard de 3 cloches. Mais – coup de théâtre – la commande est ajournée quelques mois plus tard, suite à l’apparition d’un nouvel acteur: le Lorrain Jules Robert, établi depuis peu à Porrentruy. C’est lui qui est choisi pour couler non pas 3, mais 4 cloches, celle de 1624 ayant depuis fêlé, suite à la tentative d’accordage au burin par le forgeron du village. Là non plus, les choses ne vont pas sans mal: alors qu’elles devaient être livrées en juin 1907, les cloches n’arrivent finalement qu’en septembre (photo ci-dessous), en raison de problèmes rencontrés par Jules Robert dans l’utilisation de son four flambant neuf. C’est cette belle sonnerie cristalline de 4 cloches sur le motif salve regina qui rythme aujourd’hui encore la vie des habitants d’Apples, charmant village de la Côte vaudoise.

Apples livraison cloches

– Cloche 1, note fa3 -2/16, poids environ 900kg, coulée en 1907 par Jules Robert à Porrentruy
– Cloche 2, note la3 -2/16, poids environ 450kg, coulée en 1907 par Jules Robert à Porrentruy
– Cloche 3, note do4 -2/16, poids environ 260kg, coulée en 1907 par Jules Robert à Porrentruy
– Cloche 4, note ré4 -3/16, poids environ 200kg, coulée en 1907 par Jules Robert à Porrentruy

Analyse (la3=435Hz, déviation en 1/16 de 1/2 ton)

Octave inf Prime Tierce min Quinte Octave sup
Cloche 1 fa2 -8 fa3 +3 lab3 +/-0 do4 +/-0 fa4 -2
Cloche 2 la2 +2 la3 +1 réb4 +/-0 mi4 +7 la4 -2
Cloche 3 do3 -6 do4 -2 mib4 +/-0 sol4 -6 do5 -2
Cloche 4 ré3 -6 ré4 -4 fa4 -3 la4 -5 ré5 -3

Mes plus vifs remerciements à la commune d’Apples, et tout spécialement à M. Jean Kellerhals, concierge, pour son aimable accueil et sa disponibilité. Merci également à Antoine, carillonneur à Taninges et membre de la SFC, pour les prises de vue des cloches et la vidéo. Amitiés enfin à mes excellents camarades campanaires Guilhem Lavignotte, organiste à Yverdon-les-Bains, et Dominique « Valdom 68 », membre de la GCCS, responsable des clochers de Val-de-Travers.

Sources et liens
http://www.panorama.vd.ch/report.aspx?rpt=1&id=6207
http://www.apples.ch/net/com/5421/Images/file/Paroisses/Rapport%20Eglise.pdf
http://www3.orgues-et-vitraux.ch/default.asp/2-0-2255-11-6-1/
http://www.applesnature.ch/anpa/actions-projets/patrimoine/113-les-cloches-apples.html
http://pieddujura.eerv.ch/
http://cloches74.com/
https://www.youtube.com/user/valdom68