Il est des endroits magiques qui nous séduisent instantanément, tant par leur aspect attachant que par leur situation bucolique. Dans le cas du temple de Bonvillars à la silhouette si particulière, idéalement située entre vignobles et lac, on peut ajouter une bonne dose d’histoire. Dédiée à St Nicolas, cette filiale du prieuré de Baulmes figurait en 1148 déjà dans les possessions du couvent de Payerne. Il en fut ainsi jusqu’à la Réforme. Si de nombreuses églises recèlent des éléments architecturaux de différentes époques, il est rare de trouver une telle continuité au sein d’une seule et même édifice. L’élément le plus ancien est sans nul doute la colonne romaine (1er ou 2e siècle ap JC) soutenant le portail ogival de la chapelle nord. Côté sud, on trouve d’intéressants ornements du XIIe siècle, dont certains ont malheureusement été abîmés à la Réforme. Le chœur remonte aux XIIIe et XIVe siècles. Après sa reconversion en lieu de culte protestant, le temple subit encore bien des travaux, dont l’agrandissement de la nef au sud. C’est ce qui donne aujourd’hui encore cette asymétrie des plus plaisantes à ce vénérable édifice.
Le clocher, à cheval sur le transept, semble dater du XVe ou du XVIe siècle. Si sa flèche de pierre rappelle irrésistiblement le style de la vallée du Rhône, ses 4 pignons nous font penser au temple d’Yverdon-les-Bains, distant de quelques kilomètres seulement. Enveloppé de zinc et pourvu de clochetons – sans doute à la Belle-Epoque – le couronnement a perdu son aspect heimatstil lors de la restauration d’envergure dans les années 1970. Ont ainsi été remises au jour les petites gargouilles représentant les symboles des 4 évangélistes : l’homme pour Mathieu, le lion pour Marc, le taureau pour Luc et l’aigle pour Jean. Derrière les baies géminées se cachent 2 cloches gothiques d’une grande valeur historique. La plus petite, à la pince fortement abîmée, porte la date de 1524. La plus grande, qui tinte les heures et sonne en volée à midi, semble dater du XVe siècle. Le campanologue bernois Matthias Walter – qui l’a vue en photo – estime qu’il n’est pas impossible que cette cloche soit l’œuvre de la dynastie Follare, qui a engendré les premiers représentants d’une longue lignée de fondeurs fribourgeois.
-Cloche 1, note sol#3 -5/100, diamètre 101cm, XVe siècle
-Cloche 2, note la3 -14/100, diamètre 90cm, coulée en 1524
Analyse (la3=435Hz, déviation en 1/100 de 1/2 ton)
Octave inf | Prime | Tierce min | Quinte | Octave sup | |
Cloche 1 | sol#2 -107/100 | sol#3 -129/100 | si3 -59/100 | ré#4 -43/100 | sol#4 -5/100 |
Cloche 2 | la2 -180/100 | la3 -28/100 | do4 -101/100 | mi4 +116/100 | la4 -14/100 |
La grande cloche
La petite cloche
L’ancienne horloge électro-mécanique
Mes plus vifs remerciements à M. Frédéric Piguet, syndic de Bonvillars, pour son chaleureux accueil, la documentation fournie et le verre de l’amitié. Amitiés à mes camarades campanaires Guilhem Lavignotte, organiste à Yverdon-les-Bains, et Dominique « Valdom68 », responsable technique des clochers de la commune de Val-de-Travers.
Source:
Bonvillars, au travers des écrits communaux, par Susanne Fontannaz-Jaquier, Imprimerie Cavin à Grandson, novembre 2001.